Take to me to our home ♦ Athel & Aidan

Cela faisant maintenant quelques mois depuis qu'Aidan avait toqué à ma porte, en pleurs ou presque, fuyant les soldats du CODEC et du CAA après que son mentor, l'homme qui l'avait transformé en vampire, qui l'avait formé et qui avait, je devais bien l'admettre, qui avait pris soin de lui ait été capturé par les soldats armés et bien formés du CAA. Heureusement son Créateur n'était pas un couard, bien au contraire - dieu merci même, devrais-je dire - et il préféra se sacrifier plutôt que de laisser son novice se faire prendre et embarquer contre son gré à Ribcage. Je devais au moins lui reconnaître ça : du courage, il n'en manquait pas, c'était un homme d'honneur et il avait protégé une personne à laquelle je tenais beaucoup, et ça, ça ça comptait énormément pour moi. J'avais une dette envers ce gars, même si je ne le connaissais pas vraiment. Aidan m'avait donc demandé mon aide, et jamais, au grand jamais je n'aurais pu la lui refuser. Ce n'était pas n'importe qui pour moi, Aidan était ma seconde chance de la vie. Il était en quelque sorte devenu le petit frère que j'avais perdu, celui que je n'avais pas pu protéger et qui était tombé entre de mauvaises mains. Lómion ... Mon très cher, tendre et regretté Lómion. Quand je voyais Aidan pleurer à cause de ce qu'il était devenu ou à cause de ce que la Révélation l'avait obligé à abandonner, c'est le visage de Lómion qui superposait le sien de mon point de vue et je me détestais pour ne voir en lui qu'un remplaçant et pourtant ... Pourtant je continuais à le protéger avec la même ferveur, voire même une ferveur renouvelée et bien plus forte. J'étais prête à aller jusqu'au bout pour le protéger et mon travail était bien utile pour se faire. Pour l'instant, personne n'était légalement à ses trousses, personne n'avait de pistes à son propos, personne ne savait qui il était ou même que j'hébergeais un vampire, un Nocturne dans ma propre maison, et les choses devaient continuer ainsi.

J'étais rentrée plutôt tard de mon travail au Conseil : parfois, les choses pouvaient s'éterniser et je passais la journée à traiter des dossiers urgents, à parler de lois qui passeraient ou non avec d'autres conseillers, sans avoir l'impression d'être utile à un seul instant. Je savais pourtant au fond de moi que ce que je faisais, si je le faisais bien, était essentiel, mais le fait de ne pas voir les choses porter leurs fruits directement était parfois décourageant, même si je ne risquais pas d'abandonner. Il en faudrait bien plus pour cela. Encore vêtue d'un tailleur rosé que je mettais au boulot, je rentrais en soupirant à la maison, me débarrassant rapidement dans un coin des talons que je portais aux réunions du Conseil.

" Aidan, appelais-je d'une voix chantante en levant la tête vers le salon. Je suis rentrée ! "

J'avais envie d'un peu de calme ce soir, de passer un moment tranquille avec lui, mais je sentais bien que ces derniers temps étaient durs pour lui, il avait le blues de son ancienne vie et je pouvais le comprendre. Il était jeune, il avait été élevé comme un humain ... C'était surprenant qu'il se soit déjà aussi bien adapté en aussi peu de temps, surtout vu les circonstances actuelles. En pénétrant dans le salon, je laissais ma main se promener sur les Ancolies Noires que je cultivais dans un pot près du canapé, leur transmettant un peu de mon pouvoir à chacun de mes touchés, pour les rendre plus vivace et plus belles. Je m'écroulait ensuite dans le canapé, fatiguée autant par ma longue journée que par l'utilisation de mon pouvoir.

" Aidan, t'es là ? demandais-je ensuite la tête à moitié enfouie dans un coussin du canapé. Si tu essaye encore de te la jouer Dracula de Bram Stoker en tentant de marcher sur les murs, dis le moi maintenant, que je sache à quoi m'attendre, quand tu me tombera dessus, okay ? "

Aidan, je l'avais toujours vu comme une petite boule de tendresse et d'amour, un petit être sensible, attentionné et charmeur. Enfin, charmeur, charmeur ... Disons que son charme n'était pas celui qu'il pensait. Ah, je me rappelais comme si c'était hier du soir où il m'avait abordé dans un bar, bar qui était ensuite devenu notre seconde maison lorsque nous nous étions liés d'amitié. Il semblait tout confiant au début, mais lorsqu'il avait dû se présenter et commencer à discuter avec moi, il avait presque fondu sur sa chaise en balbutiant des mots à tort et travers, le tout en devenant presque rouge comme une tomate. J'aurais pu me contenter de lui rire au nez et le renvoyer boire avec ses amis, mais un je ne sais quoi chez lui m'avait donné envie de véritablement discuter avec lui. Et puis c'était pas sa faute si le charisme naturel des Elfes avait agi avec une force inattendue sur lui, il ne pouvait pas s'y attendre, il n'était qu'un simple humain à l'époque. Je l'avais donc gentiment invité à s'asseoir avec moi et nous avions discuté toute la soirée ensemble : j'avais découvert chez lui une tendresse et une innocence que je n'avais pas vu chez quelqu'un depuis bien longtemps, pas depuis les événements qui m'avaient séparé de mon frère. J'avais beau savoir qu'Aidan et Lómion étaient bien différents, il m'était toujours difficile de les dissocier. Mais Aidan ne méritait pas que je le traite comme une simple passade, un remplaçant ... Alors je m’efforçais au jour le jour de le faire se sentir unique et apprécié comme personne. C'était pas compliqué, qui
pourrait ne pas l'aimer ?

J'accueillis son câlin avec un petit grognement de contentement : un peu de chaleur humaine, même venant d'un vamp's, ça faisait toujours beaucoup de bien. Et à ce que pouvais voir sur sa frimousse tristoune, il en avait autant besoin que moi. Je me calais un peu plus confortablement dans le canapé et passait ma main dans son dos, de haut en bas, pour lui apporter un peu de réconfort. Je savais bien que ce moment allait arriver un jour ou un autre, qu'il allait finir par craquer. Il en avait besoin, il devait extérioriser tout ce qu'il avait subi ... Et j'étais plus que prête à l'aider à passer par ce moment difficile. Lorsqu'il s'installa à côté de moi, je le laissais faire et passais gentiment ma main sur sa joue, pour chasser la larme qui s'échappa de ses grands yeux tristes.

" Aidan ... Aidan, poussin, c'est bien normal qu'ils te manquent, tu les aimes, et à eux-aussi tu dois leur manquer aussi. Comment tu pourrais ne pas leur manquer hein, toi, notre petit rayon de soleil ? dis-je d'une voix douce, en tentant de le réconforter un peu. Et ... Et si tu veux sortir, on pourra aller boire un coup ensemble dans notre bar demain si tu veux, pour te changer les idées. Je sais que c'est pas l'idéal et que tu aimerais pouvoir sortir comme ça te chante, mais on doit être prudents. Je voudrais pas te perdre au détour d'une ruelle sombre, tu comprends ... Que ce soit à cause de ton sens de l'orientation ou d'un soldat du CAA, plaisantais-je ensuite en espérant le voir sourire un peu. "

Mais il n'avait pas que ça sur le coeur, non, il voyait plus loin ... Et malheureusement, je n'avais pas de bonne réponse, pas de formules magiques pour permettre à toutes les créatures de notre monde d'enfin vivre en paix, une bonne fois pour toute. Mais pour ne plus le voir pleurer, j'aurais adoré avoir connaissance de la possibilité d'un tel miracle.

" Je crois ... Je crois que ça risque pas d'aller en s'arrangeant malheureusement chou, avouais-je en m'enfonçant dans le canapé, dépitée. Le Conseil est de plus en plus convaincu de la "mauvaise nature" des Aberrations, et malheureusement, seule, je ne fais pas le poids contre tous les autres conseillers. Mais je ne laisserais pas tomber, ça je te le promets. Pour que tous les innocents comme toi, pour ceux qui se sont retrouvés impliqués dans notre monde sans le vouloir n'aient pas à en pâtir. Après tout, tu n'avais rien demandé au début et tu dois sûrement te dire qu'être humain et ignorant était tellement plus simple, laissais-je échapper dans un chuchotement. Désolée chou, je voulais pas retourner le couteau dans la plaie, ajoutais-je ensuite rapidement, en me mordant la lèvre. "

Parfois ... Parfois je devais bien avouer que je me demandais ce qui retenait Aidan de tenter de passer le Rituel. Après tout, rien ne le retenait dans sa peau de vampire, il aurait pu redevenir humain. Et pourtant, il était là ... Avec ses crocs, à mes côtés. Et il méritait une petite vie bien tranquille.