Bad Habits || ft Edana

Les yeux grand ouvert, fixant le vide, noir, béant au travers de toutes ses coutures et autres entêtant revers. Haletante, mes mains qui cherchent à tatillon quelque chose auquel me raccrocher, n'importe quoi, pourvu que je puisse retrouver pieds. Un, deux, trois. Je ferme les yeux et il n'y a que toi que je vois. Non, non, non. Ça ne se peut pas. Un, deux, trois, sur les rythmes de mon cœur aux aboies, je les ouvre encore une dernière fois dans le but d'annihiler tes obscures reliquats. Non, non, non. Je ne le veux pas. Tout sauf ça. Tout sauf toi. Un, deux, trois. Aller, respire, tu verras, une fois détendue, ça ira. Mon corps qui s'enfonce lourdement en l'amas duveteux de mon matelas, là où mon esprit sombre en les rivages tumultueux où se perd ton aura. Enfin, tu n'es plus là. Progressivement mon cœur se détend et c'est la paix qu'en les profondeurs d'un coma indolent je retrouve finalement. Un, deux, trois, ça y est, je suis de nouveau moi. Un, deux, trois… Un. Deux. Trois… Chevelure aux boucles qui me glacent d'effroi. Parfum familier qui vient me bercer sans savoir pourquoi. C'est au travers du vide vaste et noir que s'inscrit ton regard devenu mon aliénant miroir. Le cœur en branle, les poumons sur le point d'imploser, je me redresse violemment sur mon lit, agrippant de toutes mes forces la couette sous laquelle j'essayais de me perdre, recherchant de mes appels désespérés cet air qui vient présentement cruellement à me manquer.

- NON !!!!!

Bordel de merde ! Mais c'est quoi, ÇA?!!! Non non non, faut que je sorte, que je bouge, que je ressente autre chose que ces pensées délirantes. Une chanson, une bouteille, un sandwich, n'importe quoi qui pourrait me faire oublier ces apparitions. Bondissant hors de mon lit, enfilant un jean noir et un t shirt gris perle à col v, j'attrape en arrivant dans mon salon ma veste en cuir, les clefs déposées sur ma table basse, mon portable lorsque mes yeux revolver viennent finalement buter contre une bouteille de vodka même pas encore entamée. Une amie ! C'est ça qu'il me faut, une putain d'amie !!! J'attrape alors le corps gelé de la bouteille que j'embrasse avec la joie la plus pure au monde avant de sortir de ma tanière :

- Toi, tu ne m'as jamais laissé tomber !!

Une demie heure plus tard, je débarquais au Verbis Obscura, claquant les portes de l'agence avec fracas tout en chantonnant :

- Edaaaaaaa, mon petit chaaaaaat ~ Montre-toiiii, c'est moi, ta bonne marraine Anyanka !

Je finis par te débusquer le nez sur ton ordinateur que sans plus de cérémonie je viens reclaper, t'arrachant de force à tes viles besognes :

- Désolée de t'arracher à tes obscures machinations mais toi et moi, on prend un break pour ce soir, et c'est non négociable t'as pas le choix.

M'attendant à ce que tu répliques offusquée de ma présence ici, je dresse quasi instantanément en l'air mon index en guise de stop et t'informe alors :

- Tchut, avant d'hurler et d'appeler la mort pour venir me châtier, je sais que je suis pas censée être là, qu'on est pas censée se voir, mais là, ça devient urgent et puis, rien qu'à ton air de semi comateux sur le point de gerber, je vois aussi que ton côté, nous avons des choses à déblayer. Alors tu me suis avant qu'on ne finisse par se mettre véritablement en danger.

Je te présente alors la bouteille de vodka tout sourire et de façon totalement ostentatoire :

- Puis regarde qui j'ai ramené avec moi… Tu peux pas nous dire non…

Une moue semi boudeuse et attristée aux lèvres, je te fais ma tête d'Éris abandonnée pour te faire flancher. Un, deux, trois, tu es toujours là. Un, deux trois, et c'est au travers d'un nouveau flash que tu t'imposes encore à moi. Un, deux, trois. Un, deux, trois. Je compte encore et toujours jusqu'à ce que de toi ne subsiste que ce noir qui as toujours fait parti de moi.

J'aurais juré voir le diable ce matin, mais je me suis alors rendue compte que ce n'était que l'image de mon reflet brisé entre ses doigts teintés d'un merveilleux rouge carmin. Mais vois-tu mon amie, je ne suis rien, à peine plus qu'un souffle qui s'évapore contre les remparts d'un monde devenu aussi sombre qu'incertain. Et ils en deviennent las les battements de mon cœur corrodé par ce trop plein d'abject venin qui me plombe les veines et nécrose mes bien trop sanglantes mains. L'on se connait et se soutiens mais dis-moi, seras-tu toujours là lorsque la mort viendra me chercher jusqu'en tes bras demain? Il y a des jours où tout semble si incertains que je doute même de ceux qui se dresse à côté de moi en clamant haut et fort notre : je me souviens.
Je te souris alors doucement, un air amusé venant légèrement froisser le bout de mon nez toujours aussi fin et droit malgré mes incartades pour continuer à étrangement sentir et exister.

- Donnez de la vodka à une Russe et elle ne cessera plus de miauler... Je savais bien que tes origines ne pourraient résister aux cris de détresse d'une aussi belle cuvée !

Alors je ferme les yeux et décide de croire en ces belles histoires que tu me contes afin d'entretenir la lueur là où il fait déjà si noir. Car à défaut de pouvoir, je préfère voir et ainsi savoir si tu seras mon inébranlable reposoir ou in descencio, l'écho de mon rêve illusoire. Trop folle, trop instable, trop rigide, j'ai toujours été celle qui faisait appelle à ton côté insensible pour te rendre en ma vie plus visible, seulement, tu ne m'as jamais véritablement dit si notre amitié était aussi indestructible. Je soupire alors et hausse les épaules en ajoutant la gestuelle des mains à la parole
:
- Dis-moi, est-ce que j'ai l'air d'une blonde? Parce que parfois, tu me ferais presque douter… Rha mais non, t'inquiète, je suis passée par l'accès "condamné" qu'on a fait installer et j'ai fait en sorte que les caméras de surveillance m'oublie durant un temps donné.

Je te contemple alors inhaler insouciante cet air que j'ai peur de respirer, contractant mes poumons dans l'espoir de ne pas laisser mes vieux démons s'échouer hors de celle que je tente de rester. Empoisonné par toutes ces autres parties de moi avec lesquelles je ne sais composer, je te regarde alors au travers la tempête encore et toujours briller. Faiblesse d'une mal aimé, je serais l'éclipse vouée à l'inlassablement te révéler pour en le clair-obscur de notre ciel déchiré, éternellement te laisser aller. Tournant des talons, je me contente alors d'hausser les épaules et t'avouer en ouvrant la marche jusqu'à notre accès privé :

- Si Alice veut bien suivre son dévoué Chapelier… Il y a un terrier que je voudrais lui faire visiter afin de lui faire découvrir ce qu'un rêve brisé peut véritablement receler.

Car tu sais j'ai vu le diable ce matin, souriant il m'a dit alors : tiens, voici le monde que je t'offre entre mes mains. Surprise je lui ai répondu que je n'étais rien, à peine un souffle qui se briserait contre son buste d'airain. Il m'a alors répondu d'un ton aussi roque que cristallin : enfant de la misère et du ciel carmin, quand comprendras-tu que tu es le visage du malin ô digne héritière de Caïn?