ANOTHER ONE BITES THE DUST + Edana

 

Son stylo s'abattait et se rabattait encore et toujours sur le papier glacé qui lui faisait face. Depuis des jours, ça la démangeait d'écrire une bonne fois pour toute ce qu'elle pensait à la Couronne. Mais les enjeux étaient trop grands et Edana en avait parfaitement conscience. Ses visites au Ribcage avaient été constructives et lui avaient permis de confirmer ce qu'elle pensait depuis des semaines. Cependant la jeune femme ne s'était pas attendu à une telle étendue d'atrocités. Rien que d'y penser, la brune sentait son être s'enflammer et l'envie de vengeance se propager. Mais il lui était impossible de faire quoique ce soit sans que les retombées ne soient d'une violence sans pareil. Autrement dit, l'aristocrate se retrouvait coincée et bien comme il le fallait. Un élan de rage lui fit claquer le porte-plume et se passer une main dans les cheveux. La situation dans laquelle elle se trouvait désormais était d'une pénibilité sans nom. Avoir eu accès au pouvoir, le voir retiré de ses mains, la brune pouvait encore le supporter. Mais voir son entourage lui être arraché, c'était au-dessus de ses forces.

Un soupir franchit ses lèvres alors qu'elle se relevait et enfiler un gilet léger avant de s'observer dans le miroir. La vie à Bristol n'avait rien de difficile quand son nom inspirait encore un respect certain. Mais pour autant sa vie n'était pas censée se passer ici. Ses origines, sa famille, sa vie d'avant, tout cela lui manquait. Retirer cela à l'une des plus ferventes loyalistes à Réversa, revenait à l'amputer d'une part d'elle-même. Elle n'avait pas perdu que les seuls repères qu'elle avait eu toute sa vie, c'était toute une vie qu'elle avait perdu. Une moue fatiguée répondit à ses pensées avant qu'elle ne se décide à rejoindre son frère quelque part dans ce manoir. C'est dans le salon, devant la télévision qu'elle le trouva et le rejoignit, lui piquant de temps en temps l'une des friandises qu'il s'était préparé. Et la porte d'entrée résonna.

Le lourd son du bois mit du temps à leur parvenir tant les deux étaient pris dans leur film. La brune lança un regard à Jude, histoire de voir s'il comptait bouger ou attendait de la visite, alors qu'un domestique se hâtait déjà d'aller ouvrir. La télépathe soupira, croisant les bras et se relevant pour voir ce qu'il se passait. Après tout, c'était son rôle dans cette société guindée et elle pouvait deviner à l'air de Jude qu'il ne comptait pas se déplacer pour voir de qui il s'agissait. Sans doute un témoin de Jehovah ou une connerie dans ce genre.

Elle se plaça derrière l'homme qui avait ouvert la porte et lui adressa un sourire, le congédiant du regard tandis qu'elle faisait face à une jeune femme à l'aspect... surprenant. Oui, surprenant c'était clairement le bon mot.  La journaliste ne put s'empêcher de détailler de haut en bas la femme qui lui faisait face. Ou elle avait besoin d'un bon bain ou... non en fait c'était quelque chose qui lui était tout à fait nécessaire dans l'état des choses. Les orbes saphirs continuèrent de détailler l'inconnue avant qu'Edana ne reprenne ses esprits.

« Je... peux vous aider ? »

En même temps, qu'est-ce qu'elle pouvait dire d'autre concrètement ? Même si la situation ressemblait plus à un contexte de film d'horreur qu'autre chose. Cette pensée lui fit même reculer d'un pas. On ne pouvait jamais vraiment savoir...

 

Son regard balaya rapidement la personne qui lui fait face. Ses sourcils se froncèrent lorsque la brune souffla son nom sur un ton qui ne lui plaisait guère. Ladite Edana ne recula pourtant pas, se contentant d'attendre la suite – parce que manifestement, le macchabée ambulant avait fait ses recherches en profondeur. Pas besoin de répondre à cette réponse qui ne demandait de réponse, tant la certitude se lisait sur le visage de la jeune femme. Et d'ailleurs l'aristocrate n'eut pas le temps de répondre que sa gorger fut enserrée dans une poigne d'une force étonnante – elle devait avoir avalé Hulk et la troupe des Avengers complètes pour avoir une telle puissance – et de se faire coller au mur. Un son sourd s'échappa de ses lèvres tandis que la pierre dure et rugueuse lui éraflait la peau du dos. Dans quoi s'était-elle encore fourrée, inconsciemment. Et bien entendu aujourd'hui, aucun agent du CODECS ou du CAA dans le coin. En même temps, l'aurait-il sans aucun doute laisser se faire massacrer avant d'arrêter ou d'abattre l'autre Altération, histoire d'être débarrassé de deux problèmes à la fois.

« Je crois que tu devrais arrêter les oignons, Fiona, ça n'a pas l'air de te réussir. »

À se demander quand elle allait faire son greuh. La référence à l'ogresse de Shrek n'allait sans doute pas plaire à Belzébuth devant elle, mais l'humaine s'en foutait complètement. Quitte à se prendre un mur, autant que ce soit pour une bonne raison et pas parce que la demoiselle n'avait pas eu son compte d'âme à manger. Son visage dérive sur le journal que la folle furieuse agita alors sous son nez tandis que ses sourcils se fronçaient. Le Verbis était plutôt à tendance ouverte sur les monstres peuplant les rues de Bristol et du Ribcage, alors la journaliste ne voyait vraiment pas pourquoi on venait l'agresser de la sorte. Pour une fois qu'elle n'emmerdait personne, il fallait que ça lui tombe dessus quand même !

« Un journal, chérie, ils ne t'ont pas appris ça à l'école ? Tu devrais t'y mettre, il paraît qu'une activité intellectuelle et de la culture ça évite les mouvements d'humeur. »

Le ton était caustique et mordant tandis que les orbes azures ne décollaient pas du visage de son agresseur. Elle entendant le majordome crier après son frère, la panique dans la voix. Et après, ils s'étonnaient qu'il y ait des tensions entre eux ! Le cadavre ambulant finit par la lâcher et une plainte sourde monta dans sa gorge alors que ses guibolles touchaient le sol un peu trop rapidement à son goût, laissant son corps s'étaler au sol, sous les yeux de la brune. Edana se redressa autant qu'elle le put, observant la jeune femme se pencher sur elle, toujours en agitant le journal sous ses yeux. La télépathe finit par accorder un semblant d'attention à l'image qu'elle lui montrait, ses yeux voguant de l'un à l'autre, avant qu'un rire ne passe la barrière de ses lèvres.

« Hé bah, faut arrêter la chirurgie esthétique. Parce que ça ne te réussit vraiment pas. Porte plainte, Trésor, parce que celui qui t'a refait le portrait, il t'a pas fait un cadeau... »

Sa main voyagea autour du visage de la jeune femme avant qu'elle ne baisse le journal.

« Par contre, arrête d'agiter ça devant moi ou cette conversation va mal finir. Qu'est-ce que tu me veux exactement ? »