Comment décrire le caractère d'Elizabeth Atkins en quelques lignes ? Ce n'est pas un tâche facile, car la quarantenaire elle-même est quelqu'un de relativement compliqué, mais voici quand même un essai.
Dans son entourage, Elizabeth n'a pas la meilleure des réputations. Bien des gens la voient comme bizarre, froide, voir même franchement désagréable : en toute franchise, ils n'ont pas tout à fait tort. Elle est le genre de femme qui aime garder ses distances face aux gens qui l'entourent, montrant une face d'elle -même difficile d'accès, voir intimidante ; et si cela signifie avoir moins d'amis que la plupart, qu'il en soit ainsi. Elle a toujours été une solitaire n'aimant pas se laisser marcher sur les pieds. Son humour n'aide pas non plus à se faire des amis : sombre et teinté d'un certain cynisme, il en a déjà mis plus d'un mal à l'aise... tout comme, soit dit en passant, son métier de médecin légiste.
Extrêmement consciencieuse, elle a un véritable amour du travail bien fait et juge que la désinvolture est l'un des défauts les plus énervants que l'on puisse avoir. Elle a un côté très droit, très carré, qui se reflète surtout dans sa vie professionnelle, mais aussi privée : en amour, elle s'est toujours montrée un peu trop formelle et réfléchie. Il lui est véritablement très difficile de se détendre réellement, de se laisser aller. Mais peut-être est-ce du aux difficultés de son boulot ? Dans tous les cas, ce défaut lui a déjà causé bien des problèmes relationnels.
Elle est aussi très terre-à-terre, une sceptique pure et dure : elle ne croit réellement qu'en ce pour quoi elle a des preuves concrète. Un exemple ? Élevée dans une famille fortement religieuse, elle s'est déclarée elle-même athée dès son adolescence, pour ne jamais changer d'avis sur la question depuis. On peut donc comprendre pourquoi la Révélation l'a complètement abasourdie, et ce même si elle avait déjà vu des indices de l'existence des nocturnes avant. Encore aujourd'hui, elle a du mal à y croire.
La Révélation a d'ailleurs accentué sa méfiance naturelle. A qui faire confiance, dans un monde où les pouvoirs magiques existent ? Elle s'est même mise à se méfier d'un de ses rares amis de longue date, Daniel, qu'elle soupçonne à présent de ne pas être un véritable Humain. Certains la diraient paranoïaque, mais à ses yeux, ce n'est que du réalisme. N'avait-elle pas raison quand elle a soupçonné son ex-mari de la tromper ? Elle a conscience d'être une pessimiste, mais dans le monde actuel, mieux vaut l'être, non ?
Avec son attitude déroutante, Elizabeth est généralement considérée comme une personne insensible, avec un vrai manque d'empathie. Cela n'est pourtant pas réellement le cas. Par exemple, malgré la distance qu'elle est professionnellement obligée de prendre avec les meurtres auxquels son métier la confronte, il n'est pas rare qu'elle se laisse affecter par ce qu'elle voit. Et c'était encore pire au début de sa carrière. Derrière sa force de caractère se cache un amour sincère pour sa vie, sa ville, sa société... Tant de choses que mettent en danger les Aberrations de Réversa. Elle souhaiterait réellement que toute cette misère existe bien loin de la Bristol qu'elle connait et aime. Plus encore, elle souhaiterait que rien de tout cela n'ai jamais eu lieu - elle souhaiterait retrouver l'univers normal et dépourvu de magie dans lequel elle a grandit... ou cru grandir. Altérations, aberrations, rien de tout cela ne devrait exister, et une part d'elle-même rêve chaque jour de se réveiller dans un monde logique, un monde qu'elle reconnaîtrait, où les dernières années n'auraient été qu'un cauchemar.
Mais déjà avant ça, elle avait un grand attrait pour la Justice. Ce n'est pas pour rien qu'elle s'est orientée vers un métier tel que médecin légiste. Apporter sa pierre à l'édifice de la civilisation humaine, voilà ce qu'elle a toujours désiré.
Notons finalement que malgré sa taille fine, Elizabeth est une grande gourmande. Peut-être les sucreries sont-elles pour elle un moyen de décompresser ou de retourner un peu en enfance, l'espace d'un instant. Dans tous les cas, elle aime grignoter (et serait même capable de prendre un petit en-cas juste après une dissection particulièrement éprouvante sans voir en quoi cela pourrait déranger).
Dans un appartement banal d'un coin tranquille de Bristol, à la lueur d'une veilleuse branchée dans une chambre d'enfant, une conversation animée entre deux cousines s'éternisait.
Elizabeth secoua la tête, laissant transparaître sa frustration. Elle regarda la petite tête blonde qui dépassait de la couverture en la regardant avec ses grands yeux bleus. Beaucoup de gens lui avaient déjà dit que sa petite cousine était son portrait craché au même âge - même cheveux, même visage, elles auraient pu être sœurs… mais l’aînée était persuadée qu’elle n’avait jamais été aussi peureuse et irrationnelle. C'est bien simple : Chrissie avait peur de
tout. Fantômes, cambrioleurs, sorcières, démons : tout y passait. Et pour l’heure, c’était l’histoire abracadabrante de vampires que lui avait raconté sa copine Louise de l’école qui lui empêchait de fermer l’œil.
Elizabeth soupira.
« T’es vraiment qu’un bébé », déclara-t-elle, commençant à perdre patience. Elle n’avait accepté ce job de baby-sitter qu’à condition d’avoir le temps de réviser ses leçons, mais ça faisait plus de quinze minutes qu’elle avait mis la petite fille au lit, et son gros classeur de cours restait désespérément fermé. A 16 ans, Elizabeth savait déjà parfaitement ce qu’elle voulait faire de sa vie ; et si elle voulait avoir une chance d’entrer à l’université dont elle rêvait, elle avait intérêt à travailler dur. Ce qui n’était pas facile avec une petite trouillarde sur les bras.
« C’est des inventions, tous ces trucs. Pour faire peur aux petites filles comme toi. Et on dirait que ça marche. » Elle ferma brièvement les yeux. Elle ne se souvenait pas d’avoir jamais cru dans sa vie que toutes ces histoires de monstres et d’esprits étaient plus que cela-même – des histoires. Eh ! Même au père Noël, elle n’avait jamais cru, une enfant de sept ans souriant d’un air entendu à ses parents qui tentaient de lui faire avaler ces couleuvres. Mais, clairement, la petite Christine n’était pas faite de la même étoffe.
« Qu’est-ce que t’en sais, d’abord ? Peut-être qu’ils existent. Tu sais pas. » La petite voix tremblante aurait fait pitié au plus horrible des vampires, et Elizabeth se radoucit un petit peu. Elle repoussa ses lunettes sur l’arête de son nez et répondit d’un air docte :
« Si, je sais. Si les vampires existaient, on en aurait déjà vu, tu ne crois pas ? On aurait des preuves. » A ses yeux, il était très important de considérer les preuves avant de juger de ce qui était vrai ou non... mais cela n'avait pas l'air de convaincre la petite fille. Elizabeth n'avait jamais été très douée avec les enfants.
« De toute façon, tu n'as plus l'âge de croire à tout ça. Tu es une grande fille, quand même. »Elle se releva, lassée par la conversation, impatiente de s’atteler à son travail. Elle donna un dernier baiser sur le front de la petite, s'excusant à demi-mot, déclarant qu'il était vraiment temps d'aller faire dodo maintenant et qu'elle avait des choses à faire. Elle s'attendait déjà à ce que la petite fille sorte de son lit pour revenir la déranger, mais il faudrait faire avec. Ah... elle aurait mérité sa paie à la fin de la soirée.
***
« Mademoiselle ? Comment allez-vous ? »Elizabeth eut besoin d'un petit moment avant de répondre. Essoufflée, tombée par terre sur un trottoir froid d’une propreté douteuse en cette soirée d’avril, toujours un peu sous le choc des événements qui venaient de se terminer, elle avait du mal à se concentrer sur la voix clairement concernée de l’homme qui lui faisait face, du mal à se concentrer sur quoi que ce soit, en fait. La jeune femme songeait, confusément, aux mille-et-unes mises en gardes de sa mère sur les dangers de la grande ville de Londres, où, à l’entendre, sa fille risquait de se faire poignarder à tous les points de rues ; elle avait bien rit de ses inquiétudes, mais elle riait moins à présent.
Bon sang, il ne faudrait surtout rien lui en dire.
« Comment je vais ? Comme quelqu'un qui vient de se faire agresser. J'ai connu mieux. »Elle finit par répondre mais regretta presque aussitôt son ton agressif. Le pauvre homme, après tout, n’y était pour rien : au contraire, sans doute aurait-elle du le remercier. Sans son intervention…. Sans son intervention, Dieu savait ce qui se serait passé.
Bien sûr, avec le recul, elle se disait que peut-être n’avait-elle pas eu la meilleure des réactions. A choisir entre sa vie et le contenu de son sac, sans doute aurait-elle dû se résigner, et tant pis si son porte-monnaie contenait tous les pourboires de la soirée du
Archbishop & Deacon où elle travaillait depuis deux mois. Oui, avec le recul, probablement que fuir et puis tenter de se battre avec trois inconnus mal intentionnés, surtout en tant que jeune femme plutôt fatiguée et pas physique pour un sous, était le genre d’idée désastreuse qui vous menait, dans le meilleur des cas, à vous retrouver par terre sur un trottoir sale et avec une mystérieuse douleur se faisant de plus en plus sentir à votre cheville gauche. Mais voilà, capituler, ce n’était pas sa façon de faire.
« Je veux dire. Ça va. Je crois que je me suis tordu le pied. »Elle se releva et fit la grimace dès qu’elle le posa sur le sol, songeant déjà au trajet de retour jusqu’à chez elle, et à la journée de cours de demain. S’ensuivit une vague de révolte contre les bons à rien malfaisants gâchant la vie d’étudiantes volontaires comme elle plutôt que de faire quelque chose de productif et d’intelligent. Mais l’inconnu lui parlait à nouveau, alors elle darda les yeux vers lui.
Quelques minutes plus tard, elle se trouvait dans sa voiture en direction de l’hôpital le plus proche.
Il lui avait fallu un peu de temps pour se laisser convaincre. Ce n’est pas qu’elle se méfiait – l’homme semblait honnête – mais elle était une jeune femme plutôt indépendante, et avait peur de rentrer trop tard chez elle. Mais elle avait fini par voir la raison… Non seulement sa cheville lui faisait mal, mais elle commençait à enfler, et le plus tôt un médecin y jetait un œil, le mieux.
« Vous êtes londonienne ? » Son sauveur essayait de faire un peu la conversation, ce dont, pour une fois, elle était reconnaissante : elle avait franchement envie de se concentrer sur quelque chose d’autre que sa douleur.
« Non, je viens de Bristol. J’étudie ici, la médecine. Pour devenir légiste. » Elle cita le nom de son université non sans une certaine fierté, et fut agréablement surprise quand le conducteur de véhicule lui expliqua qu’il venait du même coin qu’elle. Réversa… Une petite ville sans histoire qu’Elizabeth connaissait fort bien – autant dire qu’ils étaient quasi concitoyens.
« J’ai vraiment eu de la chance de tomber sur vous. » Avec un léger soupir, elle se tourna vers la fenêtre et regarda défiler les lumières de la capitale anglaise. Bristol… Curieux que sa ville natale lui manque ainsi. Elle n’avait jamais eu l’impression d’y être spécialement attachée, mais à présent que ça faisait près de trois ans qu’elle s’en était éloignée, elle se surprenait à regretter les rues de son enfance. Ses études étaient loin d’être terminées, pourtant. Elle devait obtenir son master de base... Faire sa spécialisation en médecine légale... Parfois, y songer lui donnait le tournis. Parfois. Mais généralement, elle se contentait d’un grave sentiment de devoir et de détermination.
Elle ferma les yeux, fatiguée. Tout ça, c’était pour plus tard… Pour une fois, elle pouvait tout aussi bien se calmer et se laisser un peu porter par les événements…
Après tout, sa vie était déjà assez ardue comme ça.
***
Les yeux fermés, immobile, Elizabeth laissait l'eau couler sur son visage. Ca faisait près de dix minutes qu'elle était entrée dans la douche, près de dix minutes qu'elle se tenait là, comme si elle espérait que le flot d'eau chaude emporterait avec lui ses doutes et ses interrogations, mais rien n'y faisait. Les images de ce qu'elle avait vu un peu plus tôt restaient imprimées dans son esprit trop cartésien pour les oublier.
Elle avait appris, avec les années de pratique, à se détacher des affaires en court. Il y avait son boulot d'un côté, sa vie privée de l'autre : elle savait très bien que si elle laissait les deux se mélanger, elle ne pourrait pas tenir longtemps. Alors, pendant la journée, elle se concentrait sur les corps qui lui passaient sous le bistouri, sur les overdoses et les traces de mauvais traitements, sur les estimations d'heures de décès et leurs causes probables, sur les homicides, les morts mystérieuses et les drames, et puis elle rentrait chez elle et soufflait en mangeant une glace devant
The Great British Bake Off et oubliait, pour la soirée, l'étendue de la noirceur présente dans l'espèce humaine.
Elle était devenue très douée pour ça. Bien sûr, à ses débuts, ça avait été difficile, même pour une femme réputée comme peu sensible comme elle. Mais elle avait appris... comme tout le monde dans le milieu judiciaire. Ah ! En fait, elle avait si bien appris qu'elle avait fini par appliquer cette merveilleuse compétence à sa propre vie privée. Quand son époux l'avait finalement quittée pour cette petite jouvencelle de même pas trente ans, parce que "la flamme était partie", selon lui, elle avait été très douée pour continuer sa vie avec une indifférence bornée qui en avait impressionné plus d'un. Elle avait adopté un chat. Elle avait embauché un bon avocat. Elle avait acheté un peu plus de glace que d'habitude. Et elle avait continué à avancer. Les cœurs brisés, c'était pour les autres.
Tout ça pour dire qu'Elizabeth était une femme avec le cœur bien accroché. Et pourtant, ce jour-là, elle commençait à vraiment douter de réussir à fermer l’œil de la nuit.
Il y avait eu ces corps. Cinq corps, une vraie tuerie, cinq corps retrouvés au même endroit dans un état qui avait été décrit comme préoccupant. Elizabeth avait pris son courage à deux mains en se mettant à la tâche, ce jour-là. Elle croyait être près à tout. Mais rien n'aurait pu la préparer à ça.
Cinq corps, donc, trois d'entre eux avec la gorge sauvagement déchiquetée et presque vidés de leur sang. Elle avait noté les traces de lutte, les empruntes de dents, l'expression de terreur sur leurs visage ; elle avait sobrement conclu, dans son rapport, qu'on aurait pu croire à une attaque animale sans les deux autres cadavres qu'on avait retrouvés à côté. Brûlés, brûlés jusqu'à en être méconnaissables... Aucune trace d'essence ou autre agent inflammable, aucun signe d'incendie à l'endroit où on les avait trouvé - elle aurait pu croire, si elle croyait à se genre de chose, à une combustion instantanée.
Et puis il y avait leurs dents. Elle s'était sentie idiote à écrire ça dans son rapport, comme si elle même doutait de sa propre santé mentale en décrivant cette bizarrerie. Car leur dentition n'était pas humaine, ou du moins ne semblait pas l'être. Les canines pointues, tranchantes, on aurait pu croire à un mauvais film d'horreur. Et si on couplait ça aux trois autres victimes retrouvés à proximité... il y avait de quoi perdre son latin.
Elle avait finit par conclure, presque désespérément, à un meurtre rituel couplé à un suicide collectif. Deux malades se prenant pour des vampires, confondant ces contes avec la réalité. Commentant un crime terrible pendant la nuit comme pour vivre leur rêve avant de se donner la mort au petit matin en voyant le soleil se lever. Une sale histoire. Une explication peu satisfaisante, aussi. Mais que trouver de mieux ? Elle était rentrée chez elle et avait essayé de passer à autre chose..
Mais les images ne la quittaient pas. Le front planté contre le mur ruisselant de sa salle de douche, elle finit par arrêter le jet d'eau et resta quelques instants dans un parfait silence.
Elizabeth, tu dois te reprendre, maintenant.Son job la méritait au meilleur de sa forme. Elle ne pouvait pas se laisser aller.
Avec une grande inspiration, elle releva la tête et sortit de sa douche. Il était temps de se reprendre en main, et son émission n'allait pas tarder à commencer.
***
Le monde avait cessé d'avoir du sens.
Elizabeth se retourna sur son lit, incapable de trouver le sommeil. C'était un problème de plus en plus fréquent, ces derniers temps... Elle ne devait pas être la seule dans ce cas. Pour Bristol, pour l'Angleterre, peut-être même pour le reste du monde... les choses avaient cessé de tourner rond.
La Révélation l'avait prise par surprise dans un moment de sa vie où elle croyait ne plus rien avoir à apprendre. Toutes les règles qu'elle croyait connaître avaient été remises en question. Elle ne savait plus à qui faire confiance. Et pire que tout, elle ne savait même plus si elle pouvait se fire confiance à elle-même.
Elle avait eu les preuves en mains, après tout. Elle qui se targuait souvent d'avoir un esprit scientifique, de croire en ce qu'elle voyait, elle avait eu les preuves directes, avant la Révélation, de l'existence de Vampires dans le monde, et elle les avait laissées de côté. Plutôt que de leur faire face malgré l'inconfort, elle avait préféré se cacher derrière une explication peu convaincante même à ses propres yeux. Elle avait refusé d'affronter l'hypothèse qui menaçait sa vision du monde. Elle avait failli à son propre devoir.
« Qu’est-ce que t’en sais, d’abord ? Peut-être qu’ils existent. Tu sais pas. »La petite fille avait eu raison. Elle ne savait pas. Et elle avait tout laissé passer, et à présent, elle n'arrivait plus à fermer l’œil.
Aurait-elle pu tirer la sonnette d'alarme plus tôt ? Alerter le public du danger qui se cachait à Réversa avant tout le monde ? Rien n'était moins sûr. Une femme seule criant au monstre n'aurait sans doute pas été prise au sérieux. Et pourtant, elle ne pouvait s’empêcher d'avoir honte, et peut-être était-ce ça qui la gardait éveillée, plus que tout le reste.
Avec un soupir, elle se leva et saisit la boîte de somnifères qui traînait sur sa table de nuit. Une mauvaise habitude... Elle était le première à critiquer l'utilisation de ces médicaments. Mais si elle voulait être en forme le lendemain, si elle voulait être capable d'affronter une nouvelle journée dans un monde qu'elle ne comprenait plus, une nouvelle journée où ses cadavres devenaient les êtres en lesquels elle avait le plus confiance... elle avait besoin de dormir.
Un sommeil sans rêve.