Rumour has it - Risa

“ Le rose t’irait du tonnerre, tu..”

“Une couleur naturelle Jo’, c’est pour passer inaperçu pas pour attirer l’attention... ”

Son argument n’était pas nouveau et il restait inchangé depuis le début de la soirée. Cassandre voulait sortir ce soir, sauf que son avis de recherche placardé un peu partout. Tout cela à cause d’un incident fâcheux et parce qu’elle faisait partie des ennemis public de cette fichue ville.  Il serait tellement plus sage de rester tapi dans les catacombes ou de parcourir la forêt pour chasser. Mais ce soir, une autre chasse aurait lieu. Pas la traque du gibier, mais celle d’information. Apparemment une drogue circulerait dans certains quartiers de Bristol, rien d’inhabituel, un impact plus fort sur les gens lambdas et les aberrations. C’était louche tout ça. Si elle était au courant, c’est parce que cela avait touché le pseudo groupe avec qui elle trainait depuis quelques temps dans les catacombes. Sachant que seule, elle ne pouvait, à son grand regret assurer sa sécurité, elle s’était rapprochée de certains aberrations, des lycans fugitifs comme elle. Dont une partie s’était fait vraiment droguer après avoir ingéré cette substance.  

A vrai dire, Cassandre avait du mal à se sentir concerné. Pourtant elle avait accepté d’aller trainer dans un des lieux de revente, un pub anti aberration, The Canteen. D'où l’importance de se grimer pour espérer faire illusion et ne pas s’attirer les chasseurs et autres types de ce genre, sinon la louve le savait, cela finirait mal. C’était un risque qu’elle s’apprêtait à courir mais par forcément par solidarité envers ces congénères, mais aussi parce que cela faisait une éternité qu’elle n’avait pas mis les pieds dans un pub.  

Pour l’aider dans sa recherche et son envie de changer légèrement d’apparence, Cassandre pouvait compter sur Jo’. Elle ne le connaissait pas y’a deux semaines, mais pourtant elle arrivait à lui faire une relative confiance. Jo’ était un lycan mais il était aussi un prostitué voire un travesti certains soirs. C’était un paumé comme elle, mais lui se servait du sexe pour gagner sa vie depuis toujours. D’après lui, certains pouvaient payer des fortunes pour se taper une aberration. Il lui avait déjà proposé de venir avec lui certains soirs, pour se faire de la thune facilement. Ce qui lui valut un grognement comme toute réponse.  La rouquine n’était pas prête à vendre son corps pour survivre.  
Ce soir, pourtant, elle l’avait laissé s’amuser avec son apparence, bien que ces consignes soient claires. Elle ne voulait pas attirer l’attention plus que nécessaire et avoir des fringues confortables mais un minimum classe sans vulgarité. Elle avait enfilé une robe fluide arrivant à mi-cuisse, un legging court faisant office de bas et des boots. Tous ces vêtements n'étaient pas à elle, elle ne savait pas d’ailleurs à qui ils étaient. Mais elle ne demanda pas plus d’information, vu qu’ils sentaient le propre et paraissaient correcte au toucher. Jo’ était en train de lui fixer la perruque. Pour un temps ce soir, elle serait une brune aux cheveux longs dans une robe de la même couleur que ses yeux en soit émeraude. C’était grisant et assez agréable devait elle avouer. Cela faisait très longtemps, qu’elle n’avait pas pris soin à sa tenue. Jo’ lui maquilla légèrement la bouche. D’après lui, elle était canon.  Cool.  

Une fois apprêtées, les deux aberrations se dirigèrent vers The Canteen. Espérant fortement qu’ils ne possédaient pas de détecteur à aberration, sinon la soirée serait vite écourtée. D’après ce qu’elle avait entendu dire, certains vampires louches fréquentaient ce pub. Quoiqu'il en soit, la prudence et la méfiance étaient de mise. Avant d’entrée, Cassandre se sépara de Jo’ et sortit sa canne blanche. Même si elle arrivait à se déplacer sans, l’artillerie aveugle aidait bien à paraitre innocente et à se frayer un chemin dans un lieu public. Le pub était assez rempli ce soir.  Cassandre arriva à se faufiler jusqu’au bar. Un verre ne lui ferait pas de mal. Mais à peine fut elle assez proche, qu’une personne la percuta et qu’une boisson fraiche se vida sur son buste. Autant, elle avait senti la personne proche, autant elle ne s'attendait pas à recevoir une liquide froid sur la poitrine. D'ailleurs, un glaçon s'était faufilé dans son décolleté.

“ Aaaah c’est froid...”

Mais qu'est-ce qui m'a pris sérieusement ? Pourquoi donc est-ce que je me retrouve dans cette situation à renverser sur une jeune femme mon soda plein de glace qui contient donc plus de glace que de soda d'ailleurs. Faisons un retour un arrière voulez-vous ? Environs cinq ou six heures avant. Oui, c'est bien comme ça, voilà !

« Purée cette enquête est une vraie merde. Je ne sais pas comment on a fait pour finir par trouver quoi que ce soit qui puisse permettre au procureur d'incriminer ce foutu salaud. » Je regarde Armand, fixement. Il se sent d'un seul coup mal à l'aise et me rend mon regard, moins assuré alors que les autres se mettent à exploser de rire. La raison de cette hilarité ? Tout simplement le fait qu'Armand n'a fait que compilé les données que nous lui avons tous filés pour qu'il les transmette à la procureur en charge de ce dossier. Ça nous fait tous bien rire quand il se met à déblatéré avec nous des enquêtes, alors qu'il a trop la trouille d'aller sur le terrain. La dernière fois que l'un d'entre nous l'a emmené, il a gerbé sur la scène de crime et foutue en l'air une ou deux preuves, si bien qu'ici, personne n'a envie de le voir rôder autour de nos enquêtes. Bien évidemment, ce gratte papier a le grade d'inspecteur, donc on ne va pas pouvoir le cantonner dans ce bureau encore longtemps... Quoi que, avec un peu d'imagination et quelques chaînes, y'a peut-être moyen de faire en sorte qu'il reste bien assis sur sa chaise et qu'il ne foute pas en l'air nos enquêtes. « Je sais, j'ai pas vraiment participer. Mais depuis que j'ai foiré une fois, personne ne veut plus me laisser de chance. » Chris, l'unique collègue qui ne prend pas pour une totale sans cœur se met à son tour à le regarder droit dans les yeux et le bleu baisse le regard. « D'accord c'était plus qu'une fois, mais je jure que je me suis arrangé. S'il vous plaît. » Tout le monde me regarde comme si je pouvais y faire quelque chose et bien évidemment, c'est encore moi qui vais me le coltiner. Sérieusement, je suis trop bonne.

« Très bien. À la prochaine affaire, je t'embarque avec moi. À la première incartade ou bourde, je te jure que je te fou un coup de pied au cul pour te sortir de la scène de crime. On est bien clair ? » Il saute limite sur place et s'avance pour me prendre dans ses bras. Tout le monde se fige et je lève la main. « Tu crois faire quoi là ? » Bah oui, autant garder son aspect glacial jusqu'au bout. Il finit par baisser les bras, résigné, enfin pas tout à fait. Je peux sentir sa joie et au fond, ça me fait sourire. Dans notre métier, on fini souvent rapidement blasé. Les meurtres, ce n'est pas toujours agréable à voir. Certains sont gores et les sociopathes associés à ces crimes sont encore pire. Les entendre parler vous donne toujours envie de rendre ce pauvre déjeuner que vous avez peiné à avaler après ce que vous avez vu. Repenser à ça ne me fait pas réellement vibrer. Enfin bon. Après cette avertissement, tout le temps prenait ses affaires pour rentrer chez lui quand Adam à ouvert la bouche. Celui-là, faut toujours qu'il se fasse remarquer. Bien évidemment cette fois-ci, son idée brillante consistait à sortir quelque part histoire de s'amuser un peu et de se détendre. Laissez-moi vous expliquer quelque chose sur Adam. À chaque fois qu'une sortie est faite, c'est lui qui l'organise et à chaque fois, ça tourne au vinaigre. La dernière fois, c'était le restau asiatique, dans lequel Maud, la seule autre collègue féminine à fait une œdème de Quincke parce qu'elle était allergique aux cacahuètes et qu'il y avait dans la sauce pour les nems. La fois d'avant on s'est tous choppé une intoxication élémentaire et celle d'avant encore on a finit par devoir aller chercher Jack au poste parce qu'il avait finit dans une bagarre.

Quand je vous dis que sortir avec cette troupe est une mauvaise idée. C'est que c'est une mauvaise idée. Sauf que malgré le fait que je garde un maximum mes distances avec eux, ils me connaissent bien. Je suis quelqu'un de calme etc... Mais je relève toujours les défis qu'on me tend, et bien évidemment, Adam a choisi cette fois-ci que nous irions dans un pub et il m'a mise au défi de les suivre pendant toute une soirée, sans partir en avance comme d'habitude. Comment refuser ? Ben j'ai pas pu. Au fond, je reste toujours cette grande joueuse qui faisait des tas de chose avec son frère et malgré tout, j'ai l'impression d'appartenir à quelque chose avec eux. Dans ces bureaux où on passe un sacré bout de temps quand même ! C'est pour ça qu'au final, je suis là ce soir. Pour ça que je me suis levé pour ramener les consommations à notre table. Pour ça que je suis revenue pour mon soda et pour ça que je me suis fait bousculer et que finalement je suis rentrée dans une jeune femme et qu'un de mes glaçon a visiblement fini dans son décolleté. « Oula, je suis désolée. Je n'ai pas fais exprès. Vous voulez un coup de main ? » Je me sens gourde et je fais signe aux autres qui se marrent comme des baleines que ça ne me fait pas rire, mais alors pas du tout. « Je ne vais pas aller chercher dans votre décolleté, mais j'ai des serviettes en papier pour me faire pardonner. » Je fusille du regard le con qui m'a poussé pour avoir sa putain de bière avant tout le monde. Il recule devant mon regard incendiaire et j'attends de savoir si elle va m'en vouloir ou pas pour ce glaçon gelé.

Essayer de renouer avec un minimum de sociabilité et vous vous retrouvez avec du soda sur votre robe et des glaçons le décolleté. Génial. Cassandre était d’abord surprise de recevoir une douche glacée sur elle. D'une main, elle écarta le tissu de la robe et de son soutien-gorge pour faire tomber le glaçon. Ce dernier glissa gentiment le long de sa peau pour finalement échouer par terre, laissant juste un tracé humide et froid.  

Avec ces mains curieuses, elle tata le devant de sa robe pour tenter de juger l’ampleur des dégâts. C'était humide et collant, ses narines humèrent le sucre. Une légère grimace s’afficha sur ses lèvres, sa robe était couverte de soda. Heureusement pas entièrement, c’était principalement localisé sur le décolleté. Elle espérait que sa robe ne devienne pas transparente à cause du liquide. Sinon ça n’allait pas le faire. De toute manière, Cassandre n’y pouvait pas grand-chose. D'ailleurs, elle ne grogna pas sur la responsable. Non elle tentait de prendre ça avec philosophie. Sa robe était mouillée et elle ne pouvait pas rien y faire.  Jo’ risquait de faire la gueule en voyant sa robe ainsi, mais bon c’était le jeu.

Elle recentra son attention sur la femme, faisant fi des réactions tout autour d’elle. Les gloussements des voisins de bar, des mecs plus ou moins éméchés qui parlaient fort et sentaient l’alcool. Des femmes qui avaient mis une tonne de parfum. Un vrai bonheur olfactif et visuel. Se mêler à la foule ne lui était pas arrivée depuis un bail. Il fallait qu’elle se réhabitue à tous ces détails. Mais avant, l’aveugle fixa son attention sur la maladroite.

« Je veux bien des serviettes en papier, ça m’aidera à éponger. Et vous pouvez m’indiquer les toilettes ? C'est que ça colle...  »  

Cassandre ne sait pas si elle pourra limiter les dégâts, en tout cas elle aimerait essayer. Bien qu’elle ne sache pas trop comment. Mais au moins, elle pourra se nettoyer les mains et enlever l’effet soda.

« Vous pouvez m’y conduire ?  » finit-elle par demander clairement. La louve ne demandait pas souvent de l’aide en temps normal, mais ce soir, elle était une aveugle lambda. Tout le monde devait le penser, c’était important qu’elle passe inaperçue. Bon se faire renverser un verre sur son décolleté n’était pas le mieux pour cela, mais dans un bar ça peut souvent arriver.

Une fois arrivée dans les p’tits coins du bar, Cassandre fronça le nez, devant l’odeur forte de désodorisant. Le parfum lavande dans un lieu aussi clos était assez écœurant. Elle aurait aimé de pas devoir le sentir. Du coup, elle se demandait s’ils avaient quelque chose à cacher.  

« On dirait qu’ils sont fans de la lavande par ici. C'est propre ?»  

Cassandre tâtonnait pour trouver le lavabo et le robinet. Sauf que ce dernier fut récalcitrant.  

« Merci de votre aide, je ne veux pas vous retenir trop longtemps. »

Je me sens tellement gourde franchement qu'en ce moment je serais prête à me planquer sous terre. Honnêtement et même si ce n'est pas entièrement ma faute, je ne peux pas m'empêcher de me dire que j'aurais dû le voir venir. Le truc c'est qu'il y a tellement de monde, tellement de sentiments qui se percute que je n'ai pas réussi à faire le tri à temps et voilà que j'ai mis quelqu'un dans une fâcheuse position. J'aurais dû rester bien planqué chez moi, ça n'aurait pas été plus mal si c'était pour faire autant de merde sérieux... Je me fatigue moi-même en ce moment, bonjour la honte. Et voilà que je les entends se marrer derrière moi. Je me retourne en les regardant de mon visage froid et sans expression et bien évidemment ils se remettent à rire... Cette équipe est vraiment démente. Le truc c'est qu'ils n'ont même plus peur de moi maintenant qu'ils savent qu'au fond, je ne suis pas aussi méchante que je veux bien le faire quoi. Oh tristesse ! Je reporte mon attention sur la jeune femme devant moi, entendant les rires et sentant parfaitement leur hilarité aux travers de leurs sentiments. Ça se paiera un jour ! Ils ne perdent rien pour attendre. La vengeance est un plat qui se mange froid. Je reporte finalement mon attention sur la jeune femme qui vient de prendre mon verre sur elle, me confond en excuse et me sens encore plus idiote au fur et à mesure que le temps passe. « Oui des serviettes bien évidemment. » T'aurais pas pu y penser avant bien entendu ! À croire que mon cerveau s'est fait la malle ce soir. Je lui tend des serviettes. « Oui, je peux bien évidemment vous indiquer les toilettes. C'est tout droit et ensuite à gauche. »

Voilà qui était fait, mais quelque chose me dit qu'elle aura peut-être besoin d'aide, parce que j'ai toujours les serviettes dans les mains. Ce qui est étrange pour quelqu'un qui m'en avait demandé deux secondes auparavant. « Vous y conduire. Bien sur pas de souci. C'est le moins que je puisse faire pour ma bourde. » Je lui tend avant finalement de me rendre compte qu'elle est non voyante. Cruchotte. Ce soir j'enchaîne les conneries plus rapidement qu'il ne le faut dit donc. C'est bien la première fois que ça m'arrive. Je lui prends donc le bras, espérant qu'elle ne déteste pas le contact, parfois on ne sait jamais avec les gens et je l'emmène directement vers les toilettes, aussi prudemment que possible pour éviter qu'elle ne prenne de nouveau un verre sur elle. Une fois éviter tout le monde et dans les toilettes, je soupire. Qui aurait cru que cette soirée soit aussi catastrophique ? Quand je dis que je suis mieux chez moi, ce n'est pas un euphémisme, mieux vaut que je reste planqué si c'est pour faire autant de merde. Je secoue la tête doucement et hausse un sourcil quand elle parle de lavande. « C'est vrai que l'odeur est sacrément forte dit donc. Je vais vérifié. » Je regarde un peu partout et ne constate rien de particulier. « C'est propre étrangement. Peut-être que l'odeur n'est pas là pour masqué, mais juste parce que la femme de ménage aime ça. N'empêche que celui qui a fait le ménage y a été fort sur la dose. » L'odeur m'agressait les sens comme pas possible. Je n'imagine même pas si un lycan venait faire un tour ici.

Je me pose tranquillement près d'elle quand elle finit par me dire qu'elle ne veut pas me retenir. « Oh ne vous en faite pas. Je suis venue avec des collègues de boulot. Paraît que je ne sors pas assez et ils essaient de m'embrigader dans leur sortie party ! » Je ris doucement. « Il faut croire que je ferais mieux de rester chez moi vu à quel point je suis maladroite. » Je n'ai pas besoin de garder absolument un masque avec elle, vu qu'elle ne me voit pas. Il n'empêche que je me sens vraiment mal. « Je suis tellement désolée pour votre robe et votre soirée. Je ne m'attendais pas à ce qu'il y ait autant d'obstacle pour ramener un verre du bar à une table. » Franchement les gens ne devraient pas être autant bourré si tôt dans la soirée. « Je veux vraiment vous donner un coup de main. Surtout que c'est un peu de ma faute si vous vous retrouvez avec une robe souillé de soda et collante par la même. Sans compter l'atroce glaçon. » C'est pas que je veux me rattraper mais presque. « Laissez-moi vous aider, je vous promets que je suis plus douée d'origine et que je sais me rendre utile. Dites-moi ce que je peux faire. Je vous en prie ! » Je souris doucement. « Vous venez souvent ici ? Ou c'était votre première fois à vous aussi ? » Autant engager la conversation et puis elle a l'air sympa, joignons donc l'utile à l'agréable.

Essayer de se comporter normalement. C’est-à-dire de pas grogner sur les gens, ni leurs sauter à la gorge parce qu’ils vous énervent. C’était fou comme la vie sociale pouvait être un challenge, quand on ne la pratiquait pas souvent. Encore plus lorsqu’on faisait partie des personnes recherchés. Pour l’instant, aucun incident à déclarer, hormis que la robe qu’elle portait avait été victime d’un soda impertinent et elle d’un glaçon dans son décolleté. Mais la coupable de son malheur semblait gentille et essayer de se racheter. C'était assez amusant à entendre.  

On lui parla des serviettes en papier, qu’elle avait demandé, sauf qu’elle attendait toujours. Mais elle n’était pas pressée. Savoir attendre et laisser au gens la chance de comprendre, qu’elle ne pouvait voir comme eux. Parfois c’était immédiat. Alors que d’autres fois les personnes étaient longues à la détente. Mais comment leur en vouloir ? La plupart des gens vivait sans aucun handicap et ne se rendait pas ou peu compte de la vie avec un problème physique ou mentale. Elle eut un sourire amusé, quand elle entendit les indications pour aller au petit coin du bar. Bien sûr, ces indications partaient d’une bonne intention, sauf qu’il manquait des variables. Elle pourrait les suivre, mais ça serait compliqué et elle risquait de rentrer dans un paquet de gens avant d’arriver à destination. Du coup, elle préféra demander clairement à la jeune femme.  

Arrivée sur les lieux, l’odeur lui piquait fortement le nez. La lavande était forte de nature, mais encore plus lorsqu’elle était chimique c’était pire. Eurk. Malheureusement elle avait besoin de rester ici, donc elle prit sur elle pour ne pas rebrousser chemin et être malade. En plus c’était propre d’après la jeune femme.  

“ C’est clair, on ne peut pas passer à côté de l’odeur. C'est peut-être une tactique pour que les gens sachent que c’est propre et qu’ils salissent moins les lieux ?” Une hypothèse comme une autre, elle ne connaissant pas l’agent d’entretien ni l’état de ces lieux habituellement. Puis au fond cela n’avait que peu d’importance.  Cassandre offrit une porte de sortie à la demoiselle mais cette dernière l’avait refusé et lui proposait son aide. Elle pouvait la refuser, mais elle devrait se dépatouiller pour nettoyer sa robe, mais elle serait tranquille. Ou elle acceptait, avait de l’aide pour la robe et tenait un moyen d’améliorer sa vie sociale au moins le temps d’une soirée, surtout qu’elle non plus ne semblait pas avoir une vie sociale de folie d’après ces dires.  

“ Si les personnes maladroites doivent rester chez elles, alors ça serait sacrément discriminatoire ! Et je devrais donc rentrer chez moi, oui je suis aussi une catastrophe ambulante. Mais bon il faut le prendre du bon côté. Ça permet de faire des rencontres insolites.”  Cassandre avait de sacrée bourde à son actif et elle le vivait bien. “ Non mais ne vous en faites pas, ce n’est qu’un bout de tissu.  Une robe qu’on m’a prêtée pour tout vous dire. Et je ne pense pas que ma soirée soit fichue à cause de la malencontreuse rencontre d’un soda avec ma robe. Après tout que la tâche parte ou pas, cela ne fera aucune différence à mes yeux. Après si elle pouvait être moins collante, ça m’arrangerait. Mais sinon, cela ne va surement pas gâchée ma soirée.” La rouquine n’était pas de celle qui se prenait la tête sur son apparence. Peut-être tout simplement parce qu’elle ne voyait pas ? Ou qu’elle n’était pas du tout dans le paraitre. Elle sourit à l’humaine qui lui proposait son aide.  

“ Je veux bien de votre aide, parce que j’avoue que je ne sais pas trop quoi faire face à cette tâche collante et humide. Peut-être que de l’eau pourrait enlever la partie collante ? Mais je ne sais pas si ça sera efficace.”  

Cassandre se sentait comme une poule devant une fourchette, elle n’avait aucune idée de quoi faire. Quand elle se tachait, bah elle changeait de vêtements et voilà. Mais là, elle n’avait pas de rechange sous la main.  

“ C’est la première fois que je mets les pieds ici. J’en avais entendu parler, mais je n’étais jamais venue." Puis fréquenter un bar ouvertement anti aberration alors qu’on en était une n’était pas vraiment conseillé. Quelle folie d’être ici d’ailleurs. “ Vous aussi apparemment, alors vos impressions sur les lieux ? En tout cas, je peux vous certifier que leurs sodas sont frais !” remarqua-t-elle amusée.

“Et pour être franche, ça fait des mois que je ne suis pas sortie un soir dans un bar. Ça me fait drôle. Mais c’est pour répondre à un défi lancé par un ami, qui doit me rejoindre dans la soirée. Plus qu’à espérer rentrer chez moi sans encombre."    Cela impliquait de ne pas se faire repérer, de ne pas perdre les pédales dans la foule et que tout se passe bien. Pour l’instant, Cassandre estimait assez bien s’en sortir. Puis elle savait que son ami, Jo, n’était pas loin dehors au cas où. " Au moins, grâce à votre soda, j'aurais au moins parlé à une personne ce soir. "

Je me sens soulagé un temps. Qu'elle ne m'en veuille pas pour ce soda versé. Qu'elle ne cherche pas à me descendre plus bas que terre. Ce n'est pas qu'elle n'en a pas le droit, mais honnêtement, je suis soulagée de ne pas ressentir de haine à mon égard par rapport à tout ce bordel. Je ne me suis jamais senti aussi mal qu'au moment où ce type m'ait rentré dedans et que j'ai malencontreusement renversé mon soda sur elle. Sérieusement, les gens ne pourraient pas faire plus attention quand ils font quelque chose ? J'avoue que l'endroit est étroit, mais il ne faut pas abusé non plus. Et moi qui donne des instructions à une malvoyante pour qu'elle aille aux toilettes... S'il y a bien une soirée où j'ai été débile, c'est celle-là. Mais j'ai une chance incroyable, elle ne prend pas ombrage de ma maladresse manifeste. Une fois dans les toilettes, je me sens un peu revivre. Sans toute cette foule et ses émotions, la soirée me paraît bien moins lourde, même si je me sens toujours gourde et totalement désolé envers cette pauvre jeune femme. L'odeur cependant.... Malgré la propreté qu'il semble régner, j'ai la très nette impression que quelqu'un veut tuer ceux qui entrent ici, ce n'est pas possible autrement. « Je ne sais pas, mais ça peut être aussi une technique pour faire reculer les gens parce que l'odeur est in soutenable et tenir donc ce lieux plus propre que si tout le monde entrait. » Les théories vont bon train et je trouve ça amusant de parler de ça alors qu'au fond, ça n'a rien de particulièrement drôle. Je finis par dire que j'aurais mieux fait de rester chez moi vu à quel point je suis maladroite.

Je ris doucement à sa réponse. « Effectivement insolite c'est certains. » Je la laisse continuer tranquillement. Elle est différente des gens que je rencontre tous les jours. Je ne saurais pas dire pourquoi, c'est comme si ses sentiments ne collait pas avec la foule qui nous avait entouré quelques minutes plus tôt. Est-ce que cela vient du fait qu'elle ne s'énerve pas alors que d'autres le feraient sans aucune hésitation ? Ou autre chose ? En voilà une bonne question, je me la pose assez souvent à dire vrai. Je me pose probablement trop de question ce soir. « Vous le prenez bien, parce que croyiez-moi, mais je connais quelques personnes dans l'entourage de mes collègues et moi qui m'auraient hurler dessus et prétextant que j'avais gâché leur journée, ou soirée. Ce n'est pas la première fois qu'on me rentre dedans et que je finis par renverser un verre ou autre. La dernière fois, c'était une tasse de café. Heureusement qu'il s'agissait d'un café glacé, sinon je vous raconte pas l'état dans lequel elle se serait mise. » Je n'ose même pas imaginé si j'avais renversé du soda sur la robe de la pouffe, j'en aurais entendu pendant des semaines, voir des mois. Non sérieusement, cette bonne femme était affreuse... Enlever la tâche. Ohhh une idée, un truc de grand mère. « Si vous me laissez votre robe, je dois pouvoir enlever le collant sans que ce ne soit trop horrible et que cela vous gêne pour la soirée. » Je souris doucement, je demande à une pauvre femme d'enlever sa robe devant une inconnue. « Je vous certifie que je n'ai pas d'autre intention que d'enlever la tâche collante. »

Bon sang, je ne voulais pas qu'elle s'imagine que j'avais une autre idée derrière la tête. Sérieusement, ces derniers temps, je travaillais probablement trop sur des agressions et autres... Changement de sujet par pitié. Je finis par lui demander si elle venait souvent ici et sa réponse m'étonna en un sens. Tout autant que la suite de sa phrase. « Disons qu'il y a vraiment beaucoup trop de monde pour moi. » Et mon petit cœur qui ne supporte pas toute cette proximité et tous ces sentiments de partout qui me donnent envie de gerber. « Je crois bien que je ne viendrais pas souvent. J'ai vraiment besoin d'endroit plus calme et je comprends pourquoi je reste plutôt chez moi en faite. » Je ricane doucement. « Et vous alors ? Vos impressions ? » Je me demande si elle y reviendrait de son plein grès sans que cela ne soit un pari. « Au moins, ce pari vous aura faire rencontrer un soda ! » Je ris doucement. « Ce n'est pas faux. » Je souris une nouvelle fois, elle ne pouvait pas me voir, donc je pouvais être plus décontract. « En fait, notre rencontre n'est pas si mal, j'évite d'entendre les blague graveleuse de mes collègues toute la soirée, sur toutes les bombasses potentiels qu'ils pourraient mettre dans leur lit. Ce n'est pas plus mal. » Parce que quand ils commençaient, il ne s'arrêtait plus. « Et puis pour rentrer sans encombre, je pourrais toujours vous aider sur une partie du chemin, pour me faire pardonner. » Oui je sais, j'ai toujours envie de me faire pardonner, je suis comme ça. « Au fait, je m'appelle Risa. Et je suis ravie de vous avoir rencontré. » Même si cette rencontre était étrange. En tout cas pour l'instant, j'attends de voir si elle veut bien me passer sa robe pour lui éviter d'être collante toute la soirée.

L’odeur des commodités semblait les incommodées tous les deux, si on leur demandait leur avis sur la propreté des lieux, elles pourraient le notifier. Voilà qu’elles échangeaient sur leurs maladresses respectives. De nombreuses choses pouvaient énerver Cassandre, mais pour elle cette maladresse ne valait pas qu’on gaspille son énergie. Ce n’était pas grave, juste une robe tachée. Il n’y avait pas mort d’homme. Bon, elle n’avait pas toujours réagi avec calme. Parfois il lui arrivait d’engueuler les gens qui lui fonçaient dessus ou qui était au travers de son chemin. Ce n’était pas automatique, tout dépendait beaucoup de son humeur en fait. Et ce soir, elle était d’assez bonne humeur, autant en profiter.  Cassandre sourit en écoutant les péripéties de la jeune femme.  

 « J’avoue qu’avec une boisson chaude, je ne sais pas comment j’aurais réagi. Mais sinon, dans une foule aussi dense, les maladresses arrivent souvent. Donc bon, ça sert à rien d’insulter le fautif, ça n’a jamais aidé à remonter le temps.» Alors que c’est une chose qui pourrait être super pratique de pouvoir remonter et jouer avec le temps.  

« Ma robe ?» répétait elle un peu étonnée qu’on la lui demande. Ce n’était que le début de la soirée, c’était quand même un peu trop tôt pour enlever ses fringues. Sans compter que la dame semblait gentille, mais pouvait-elle vraiment lui faire confiance ?  Et puis elle n’avait aucune envie de se désaper. Elle se trouverait trop à découvert et en position inconfortable. Tout en réfléchissant à la question, elle écoutait la jeune femme.  

« En fait, je viens d’arriver, je n’ai pas vraiment eu le temps de bien ressentir l’atmosphère du lieu. En tout cas c’est bruyant et ce n’est pas facile de circuler.» Elle n’était pas sûre d’y remettre les pieds un jour. Déjà parce que ce n’était pas raisonnable et puis elle n'avait pas l’impression que l’atmosphère du lieu lui plairait vraiment.  Mais ça c’était autre chose. Ainsi elle lui évitait de supporter des collègues lourds.  « C'est un mal pour un bien alors. » rétorqua t’elle souriante.  

« C'est gentil merci. » Bien qu’elle sût pertinemment qu’elle déclinerait l’offre de se faire raccompagner chez elle. La louve ne pouvait pas lui donner son adresse ni une quelconque piste de l’endroit où elle pouvait aller. Mais dans d’autres circonstances, elle en aurait profité.  

« Enchantée, moi c’est Elya.» son deuxième prénom qui lui servait depuis quelques semaines. L’autre, Cassandre, elle préférait le taire par sécurité. « Moi aussi, ça m’a permis d’aborder cette soirée avec moins d’appréhension. » Même si elle n’avait pas du tout prévu ça, mais elle avait pu constater qu’elle était encore capable d’avoir une conversation tout à fait censée avec une personne lambda. Après des mois à être considéré comme un monstre, il lui arrivait de se poser la question.

D’ailleurs, il était temps qu’elle donne sa réponse vis-à-vis de sa robe. Elle avait fini par trancher. « Oubliez la robe. Ce n’est pas grave si elle colle un peu. Surtout que c’est au niveau de la poitrine et que je n’ai pas pour le projet de me peloter en public. Puis personne n’en saura rien. Et même si ça se sait, franchement, je m’en fiche. Je ne vais pas laisser ça gâcher ma soirée.» La positive attitude s’était emparée de la rouquine, faisant fi des détails négligeables qui pourraient lui pourrir la vie. Et la robe collante était vraiment au bas de l’échelle.  

« Je ne sais pas vous, mais je trouve qu’on a passé trop de temps au pays de la lavande. J’en peux plus de cette odeur qui commence à me donner la migraine. » C’était vraiment trop fort.  

« Et si au lieu de me faire une démonstration de votre talent contre les tâches, vous m’offrez un verre ? »  

D’un coup, la porte des toilettes s’ouvrit avec fracas. Cassandre sursauta tellement le bruit l’avait surprise, elle était prête à sortir les griffes. Rha elle s’en voulait un peu d’avoir relâchée son attention. Mais le brouhaha de la pièce principale était important.  

Pile : Deux femmes surgissent et ont décidé de leur chercher des noises. ( à toi de trouver la raison)

Face : C’est un couple (mixte ou homo au choix) très occupé à s’embrasser et à vouloir se sauter dessus, qu’ils n’ont même pas remarqué la présence des filles.

La rencontre fortuite avait mal débuté mais finalement ça allait. Pour l’instant la louve s’entendait bien avec cette femme Risa. C'était succinct et spécial de faire connaissance dans les toilettes d’un bar. Mais après tout, il fallait prendre les choses comme elles venaient. Le pire dans tout ça, était vraiment l’odeur forte de lavande. Cassandre avait presque l’impression que si elle restait trop longtemps dans cette pièce, elle sentirait à jamais la lavande. Une horreur en soi. Voilà pourquoi elle avait proposé à la jeune femme de lui offrir un verre. Un bain de foule parmi des individus alcoolisés et bruyants lui semblait plus tentant que rester ici.  

Puis le but de sa soirée était quand même de reprendre un minimum de vie social et d’essayer d’en savoir plus sur une drogue qui circulait dans ce bar. Il fallait y aller par étape ; déjà se sociabiliser un minimum et pour le reste on verra.  

Le bar me parait un bon endroit pour le reste de la soirée” répondit elle en réponse à Risa. Ça serait toujours mieux que d’être balloté dans la foule. La louve entendit la porte s’éclatait avec fracas contre le mur des toilettes. Puis des bruits de bouches étranges, qu’elle finit par reconnaitre comme des baisers. C’était assez et étrange, surtout qu’il n’y eut aucun moment de blanc. Rien ne semblait arrêter la fougue des visiteuses. Son odorat lui avait permis d’identifier en partie les intrus comme étant des femmes. Cela fut confirmer par Risa. Elle sentit la main de la femme se crispait sur son bras. Bon il fallait vraiment sortir d’ici.  

Assister à une copulation en directe ne faisait pas partie du programme de la soirée. Il fallait sortir d’ici. Même si elle ne voyait rien, Cassandre n’était pas sourde. Entendre les gens s’aimait ne faisait pas partie des choses qu’elle aimait. Encore plus quand c’était des inconnues dans des lieux publics. Et avec son odorat de lycan, elle pouvait ajouter les odeurs particulières à ce genre d’acte. Non clairement, elle ne voulait pas assister involontairement au spectacle.  

Cassandre se racla bruyamment la gorge, comme si elle avait un chat dans la gorge. Visiblement cette première tactique n’eut aucun effet. “ Excusez-moi” finit elle par dire en haussant le ton, espérant ainsi capter leurs attentions. Il eut un blanc, suivit d’une voix énervée d’être interrompue. “ Quoi ? T’vois pas qu’on est occupée ?  Ça te débecte de voir deux femmes s’embrasser ?”  

Cette répartie surprit la rouquine. Comme si c’était elle qui était en tort. Non mais sans blague. La louve gronda au fond d’elle. Mais elle était encore maitresse d’elle-même.  

“Franchement j’m’en fous. Par contre je n’apprécie pas qu’on me bloque le passage. Si vous vous arrêtez quelques instants, mon amie et moi-même pourrions sortir et ainsi vous pourriez reprendre votre activité sans souci.” Cassandre avait essayé de répondre avec un minimum de diplomatie, mais son ton restait quand même sec.  

Il y eut un blanc de plusieurs secondes. Puis du mouvement, peut-être que les demoiselles les laissaient partir ? “Okay cassez-vous.” Puis la deuxième femme rajouta. “ Oh mais si vous voulez rester, vous pouvez. Vous êtes magnifiques.” Dieu du ciel, voilà qu’on leur proposait un plan à 4, parce qu’il ne fallait pas être devin pour deviner les attentes de la demoiselle. Cette soirée partait vraiment à volo. Il fallait vraiment qu’elles sortent d’ici. Cassandre prit la main de Risa.  

“ Quelle aimable et inattendue proposition, que nous préférons décliner. Nous allons vous laisser œuvrer en tout intimité.” Cassandre avait pris la partie pour répondre aussi pour Risa, elle ne connaissait pas son avis que la question mais elle la sentait assez tendue sur le sujet.  

Enfin elles sortirent des lieux, laissant derrière elle, les demoiselles.  Enfin l’odeur de lavande était derrière elle. “ J’ai pris la liberté de répondre pour nous deux, après si vous êtes intéressée par la proposition vous pouvez rester...” souriait elle à sa nouvelle connaissance.

Cassandre réalisa que depuis son arrivée dans ce bar, elle n'avait toujours pas bu un seul verre. “ On va boire ce verre ?”

Pour plaisanter, Cassandre proposa à Risa de rejoindre le couple féminin qui était très occupé aux toilettes.  Peut-être que cela aurait pu lui plaire, après tout elle n’en savait rien. Mais sa réaction, lui disait bien que cela n’était pas son truc. Mais ça tirait un mince sourire au visage de la louve. C'était bien les réactions entières et spontanées.  
“ Y’a pas de souci. ” elle n’allait pas lui en vouloir pour si peu. Ça serait très ridicule si c’était le cas.  La rouquine rajouta suite aux révélations de Risa. “ C’est nul les mauvaises expériences, j’espère que t’arrivera à passer outre.”   Elle savait que ce n’était pas simple, cela prenait du temps. Mais parfois, il était salvateur d’arriver à aller de l’avant. Après elle faisait bien comme elle le voulait, ce n’était pas le problème de la louve. Puis dans ce domaine, elle ne pouvait guère être utile, à part être une oreille attentive.  

Cassandre se laissa guider vers le comptoir. Slalomant dans la foule, avant de se retrouver perchée sur un des hauts tabourets, elle s’appuya sur le comptoir. Diantre cela faisait des mois, voire des années, qu’elle n’avait pu s’accouder à un bar bondé. Quoique la dernière fois n’était pas si lointaine, ça remontait à quelques mois dans la boite de nuit d’Eris, quand elle avait croisé Kyle. Mais le lieu était vide. Ce n’était pas le cas de ce bar. La présence d’autant de monde était un petit perturbante pour ces sens, mais bénéfique pour sa sociabilité. Elle capta qu’on attendait qu’elle commande sa boisson. “ Une tequila sunrise “ Répondit elle spontanément, sans vraiment y avoir réfléchir. Mais c’était la boisson fétiche de ces soirées entre amis au temps de Reversa. Une autre époque.  

Un sourire amusé s’étira sur ces lèvres quand elle écoutait Risa. Cela manquait de tact, c’était certain, mais Cassandre trouvait cela plutôt marrant. En tout cas, elle ne se vexait pas pour ces paroles.  “ Ce n’est rien. Tu sais la plupart des gens n’ose pas aborder le sujet de peur de parler du handicap. Comme si c’était une chose horrible et taboue que l’on devait absolument cacher.  Si on n'en parle pas, alors ça n’existe pas. J’ai toujours trouvé  ce précepte idiot.”   Oh oui mais depuis toujours elle avait connu ça. “ J’espère que votre collègue va trouver un emploi qui l’intéresse. Parfois, le plus dur est de se contenter des opportunités qu’on nous offre même si ça ne nous intéresse pas.  Pour ma part, honnêtement je galère un peu, en ce moment. ” Mais cela n’avait rien avoir avec son handicap, c’était plus à cause de sa condition de fugitive. Dur de postuler quand sa binette est placardée un peu partout en ville. “ Mais sinon je suis musicienne, je donnais des cours au conservatoire de Reversa. Suite aux évènements j’ai tout perdu...” Cassandre préférait être franche, mais ne pas trop en dire non plus. Déjà qu’elle en avait surement trop dit. Une prof aveugle au conservatoire de Reversa, il n’y avait pas des masses...Donc si elle voulait se renseigner sur elle, Risa pouvait trouver son identité. Un risque de plus dans cette soirée. D’ailleurs elle venait de tilter qu’elle avait admis vivre à Reversa.  La ville des montres. Oh Bazar pourvu que son acolyte de soirée ne soit pas parano ou flic. Trop tard de toute manière, puis leur commande arriva. Cassandre prit le sien en essayant de pas penser au pire.  

“ A la tienne !” elle trinqua avant d’en boire une gorgée. “ Et toi tu fais quoi dans la vie ?” demanda elle à son tour, histoire de faire la conversation. D'ailleurs, elle ajouta une autre question. “ Tu connaissais Reversa ?” Simple curiosité.  

La demoiselle sourit quand Risa parlait de musique. Elle ne pouvait qu’être d’accord avec elle. En parler, réveiller le manque, telle une droguée, la musicienne n’avait pas eu accès à sa dose depuis très longtemps. Depuis toujours la musique l’avait accompagné, construit et fait grandir. Grace à elle, elle avait pu affronter la cécité et les pertes familiales. Rien qu’une mélodie lui permettait de créer une bulle, une armure contre le reste du monde. Seules les notes comptaient. C’était son échappatoire face à la vie. Mais elle l’avait perdu la possibilité de jouer depuis la révélation. Un des regrets qui composait son existence, même si elle espérait secrètement qu’elle pourrait à nouveau jouer un jour. Cassandre ne se voyait pas abandonner la musique à jamais. Tout simplement parce qu’elle ne saurait pas quoi faire d’autre, à part avoir un karma pourri et une vie à problème...  

Elle écoutait attentivement les réponses de Risa. Oh une réversienne comme elle. Peut-être qu’elle s’était déjà croisée dans la ville qui n’était plus dans un autre temps. Cassandre n’en avait pas le souvenir en tout cas, mais bon elle ne connaissait pas non plus tous les habitants de Reversa.  Par contre la suite était beaucoup moins cool. Une flic. Super. Bien sûr, il fallait que dans cette foule, elle fasse du copinage avec une criminologue. Elle n'aurait pas pu tomber sur une épicière ou une libraire ? Cassandre se rappelant qu’elle était grimée n’avait aucune raison de paniquer. Mais quand même, ce n’était pas de bol.  

“ J’avoue que oui. Mais c’est parce qu’on a souvent l’image du flic obtus qui cherche à avoir un coupable quitte à boucler un innocent. Alors que j’imagine et j’espère que ça doit être rare.” Cassandre sourit. “ Cependant, c’est rassurant d’entendre des gens comme toi, qui cherche simplement la vérité sans tout mettre sur les dos des coupables désignés.”  Cassandre but une gorgée de son cocktail. “ T’excuse pas ! Parler de passion de son métier, c’est intéressant à écouter et rassurant dans ta branche. Tout comme de savoir que les aberrations ne sont les seules responsables des crimes en ville.” Le contraire l’aurait étonné. Certes, il y avait des dégâts mais ils n’étaient pas responsables de tous les maux de la terre.  

“Parfois l’homme oublie qu’il peut être un danger à lui tout seul.. Mais c’est tellement plus facile d’accuser ce que l’on ne connait pas... La peur de l’inconnu est un grand classique dans l’histoire." Elle devait peut-être s’arrêter là, sinon elle allait dévoiler sa nature, si ce n’était pas déjà fait. Sans s’en rendre compte la lycane avait déjà fini son verre. Elle avait perdu l’habitude de sociabiliser dans un bar et devait avouer que cela faisait du bien. Pendant un instant, elle oubliait qu’elle était une fugitive.  

“ Ouh je vibre.” s’étonna elle-même de ressentir ce genre de sensation, avant qu’elle se rappelle de la présence d’un téléphone dans la poche de sa robe. Elle sortit un antique téléphone à clapet, on était loin du dernier modèle tactile et tout. Mais c’était suffisant. Puis au moins, elle avait juste à l’ouvrir pour pouvoir parler à son correspondant, pas de prise de tête pour trouver les touches. “ Excuse-moi” Ce n’était pas très poli de décrocher alors qu’on conversait avec quelqu’un, mais peu de personne avait son numéro de sa carte prépayé. Donc cela devait être important. “ Oui.” “ Darling, la tension monte, il va y avoir du grabuge. Faut qu’on s’tire."

Malgré le brouhaha du lieu, Cassandre avait très bien entendu Jo’ son ami. La récréation sociale était terminée. “ La tension monte dehors, du coup j'vais pas trainer.” Elle n’avait pas à lui donner cette info’, mais s’il y a une baston ou une échauffourée, cela pouvait être utile d’être au courant. “ Merci pour le verre.”  

Maintenant, le but du jeu était de se trouver la sortie et de se carapater avant que le vent tourne à la tempête.