Sujet: visite au Ribcage (pv Aidan) Jeu 16 Mai - 11:10
Etait-ce une bonne idée ? Il n’en était pas certain. Alec l’avait tenu informé de la situation. Cette absence avait trop durée et depuis le départ de Ljena, Joren se sentait terriblement seul dans la colocation. Ils avaient vécus de très bons moments tous ensemble et maintenant les murs de cette maison sonnaient vides. Bien qu’Alec venait régulièrement lui rendre visite, Joren repoussait toujours le moment pour rentrer. Non pas qu’il n’aimait pas se retrouver seul. Mais chaque pièce, chaque objet, lui rappelait les souvenirs d’un passé maintenant lointain. Il aurait souhaité avoir eu plus de cran, avoir été plus disponible pour Ljena, pour Aidan. Tous ses amis quittaient peu à peu Bristol. Non pas par la voie des airs, du train ou d’un bus. Mais par une vie éteinte, volée par l’intolérance des hommes. Chris, le premier Lycan connu n’était plus de ce monde. Et pourtant il avait tant appris à Joren. Toutes ces pertes étaient difficiles à supporter.
Alec voyait bien la détresse dans le regard de Joren quand il parlait d’Aidan et du Ribcage. Alors, un jour, il lui donna une indication précieuse d’où se trouvait réellement Aidan et avait tout mis en place pour que les deux protagonistes puissent se rencontrer. Rentrer dans le Ribcage n’était pas une mince affaire. Il fallait prévenir plusieurs jours à l’avance pour mettre en place la rencontre.
Le taxi déposa Joren devant le Ribcage, anciennement Réversa. Le jeune homme déglutit difficilement face à l’imposante structure. Tout semblait mort ici. Deux gardes armés jusqu’aux dents se tenaient devant l’entrée du premier bâtiment. Joren releva le col de sa veste et pris son courage à deux mains. Son cœur battait rapidement et lorsqu’il arriva à hauteur des gardes, il leur montra son pass reçu quelques jours plus tôt. L’un des gardes marmonna dans sa radio et la porte s’ouvrit de façon automatique. Une femme grande et maigre interpella Joren pour qu’il la suive. Rien n’était laissé au hasard. Le jeune homme emboita le pas de la femme et tous deux s’engouffrèrent dans un long couloir sinueux. Tout était cireux, lumineux et presque trop propre. Aucun son, aucun bruit inquiétant. Il avait l’impression d’entrer dans un endroit hermétique où la fuite semblait presque impossible. Des caméras de surveillance étaient postées à pratiquement tous les recoins. Comment faire sortir Aidan de cet enfer ?
« Veuillez patienter ici Monsieur. »
Elle pivota sur ses talons et laissa Joren s’installer sur une chaise. Le couloir était vide. Seule une petite fenêtre donnait place à une luminosité blanchâtre. Elle donnait vue sur la cour intérieure du bâtiment. Personne dehors. Joren lâcha un long soupire d’inquiétude, quand soudain la porte s’ouvrit. Un homme à forte carrure lui jeta un regard bienveillant et lui fit signe d’entrer dans la pièce.
« Monsieur Chase vous rejoint dans quelques minutes. Vous pouvez patienter dans la salle de visite. »
Joren hocha la tête, puis passa la porte. La pièce était spacieuse. Une table et deux chaises se trouvaient au milieu et plusieurs caméras étaient postées aux coins de la pièce. Une vitre blindée juste derrière son dos. Après quelques minutes de patience, qui semblaient être une éternité, Aidan passa la porte. Joren se leva brusquement, puis se jeta dans les bras de son ami.
« Bordel Aidan ! »
Il se retira de l’étreinte et tapota énergiquement sur les épaules d’Aidan, comme pour vérifier qu’il était bien réel.
« Je me suis fait un sang d’encre pour toi ! J’ai cru que … Alec m’a raconté. C’est lui qui m’a dit que tu étais … dans cet endroit. Ca va ? On te traite correctement ? S’ils te font du mal, jte jure que … »
Les deux amis prirent place sur les chaises rustiques.
« Bon sang, mais comment va-t-on te sortir de là ? Cet endroit me fout la chair de poule. Ca va ? Tu as une mine affreuse. »
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Sujet: Re: visite au Ribcage (pv Aidan) Jeu 30 Mai - 19:31
Aidan n’y croyait pas. Joren était venu le voir. Il allait enfin revoir son meilleur ami après des semaines de silence, des semaines durant lesquelles le jeune homme avait dû se faire un sang d’encre. Aidan s’en voulait, il culpabilisait comme un idiot, alors qu’il n’y était pour rien. En partie. Car rien de tout ça ne serait arrivé s’il n’avait pas éprouvé le besoin d’aller voir ce qui se passait au moment de la révolte et d’y participer malgré lui. Il avait été témoin d’horreurs sans nom et sa haine envers les autorités n’avait fait que grandir. On lui avait tiré dessus et sous le coup de la douleur et de la rage, il s’était attaqué à un humain. Il l’avait tué. Alors qu’il avait toujours réussi à se contrôler. Il s’en voudrait sans doute toute sa vie pour ça. Quelque chose comme ça ne s’oubliait pas quand on avait une conscience et celle d’Aidan était parfois bien trop exacerbée pour son propre bien. Il avait été fait prisonnier et forcé à passer le Rituel. A présent, il était obligé de rester là le temps de se réhabituer à une vie de simple humain. Ce n’était pas une prison, mais ça y ressemblait fortement. C’était probablement mieux que l’endroit où on retenait les vampires, c’était certain. Pourtant, Aidan avait du mal. Il vivait la situation comme une réelle injustice. Il avait fini par accepter sa nature de vampire, il en avait fait un atout et maintenant, c’était de l’histoire ancienne. Bien entendu, il y avait plein d’avantages. Il pouvait à nouveau sortir le jour, il pouvait manger tout ce qu’il voulait, il n’était plus en proie à des pulsions meurtrières et à une certaine soif de sang. Mais il n’avait plus la force et la rapidité d’avant. Ces caractéristiques qui lui avaient souvent permis de sortir ses amis, mais aussi des inconnus, du pétrin. Il poussa un petit soupir alors qu’il se dirigeait vers la salle des visites, accompagné d’un garde. Il n’aimait pas se sentir observé et surveillé.
Finalement, il entra dans la pièce et aperçut Joren. Il n’eut même pas le temps de réagir que son ami s’était déjà jeté dans ses bras. Le jeune homme sentit les larmes lui monter aux yeux alors qu’il lui rendit son étreinte, se blottissant un instant contre son meilleur ami. « Tu es venu… » Une fois séparés, Aidan leva les yeux vers son ami, se retenant pour ne pas fondre en larmes. Il avait toujours été quelqu’un de sensible, mais depuis tout ça, il avait l’impression que c’était encore pire. Mais ça irait sans doute mieux une fois qu’il serait sorti d’ici et qu’il aurait repris une vie normale. Il l’espérait, du moins. Il sentit une nouvelle vague de culpabilité le submerger aux paroles de son ami. « Je suis désolé…Je ne voulais pas t’inquiéter…mais on ne m’a pas vraiment laissé le choix. » Il lâcha un petit rire sans joie, puis haussa les épaules. « T’en fais pas. Ça va. Le mal est fait, de toute façon. Maintenant, je dois attendre. » Il poussa un soupir et alla s’installer sur l’une des chaises disposées dans la pièce. Il se sentait toujours faible et il avait l’impression de vivre au ralenti. C’était une sensation si étrange. « Ils m’ont obligé à passer le Rituel. Je…Je n’ai jamais eu aussi mal de toute ma vie. Même la transformation en vampire n’a pas été aussi douloureuse. J’ai cru que j’allais y rester. » Une larme coula le long de sa joue sans qu’il ne cherchât à la retenir. « J’ai du mal à me réhabituer à une vie d’humain. Mais ça va venir. Ils vont me laisser sortir une fois qu’ils me jugeront prêt. »
Il adressa un petit sourire forcé à Joren. « Ce sera comme au bon vieux temps ! On va pouvoir à nouveau se goinfrer de pizzas en jouant aux jeux vidéo ! » Au fond, il s’en réjouissait, il avait hâte de retrouver cette vie ordinaire. Mais de l’autre côté, il ne pouvait pas oublier ce qui s’était passé, ce qu’il avait vu et vécu. « Je les déteste. Si tu avais vu ce qu’ils ont fait… » Il se tut. Ils étaient probablement surveillés et on les écoutait certainement. Mais une fois dehors, Aidan ferait pleinement part de ses plans futurs à Joren. Il n’était peut-être plus un vampire, mais ça ne l’empêcherait pas de lutter pour la cause de ceux qu’on appelait Aberrations. « Et toi ? Comment tu vas ? »
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Sujet: Re: visite au Ribcage (pv Aidan) Mar 4 Juin - 11:11
C’est dingue. Après tout ce temps, Joren s’était fait à l’idée d’avoir un ami vampire. Au départ la peur l’avait forcé à réagir de façon complètement démesurée et irrationnelle. Un peu comme tous ces gens qui n’apprennent pas à vivre en harmonie avec les autres. Il avouait au fond de lui, ne pas avoir donné assez de confiance en Aidan. Il avait cru qu’un jour son ami se retournerait contre lui. Qu’il n’arriverait pas à garder le contrôle de ses pulsions animales. Et finalement, depuis leurs retrouvailles, Joren n’avait jamais eu à douter d’Aidan. Au départ oui … mais le temps avait renforcé leur amitié et le jeune homme avait vu de ses propres yeux qu’Aidan n’avait pas autant changé qu’avant. Un homme bon reste un homme bon, malgré son changement d’état. Il avait été le vampire le plus serviable et le plus efficace qui soit. Travailler à ses côtés en cuisine, dans son bar, ce fut vraiment les plus beaux moments de sa vie.
Jamais Joren n’avait espéré pouvoir vivre une vie aussi simple, malgré les complexités environnantes. Bien sûr qu’il avait peur lorsqu’il mettait les pieds dehors. Sur qui allait-il tomber ? Un Nocturne complètement détraqué ou un humain au cerveau grillé par la peur et la haine ? Car différencier une Alteration d’une Aberration, d’un humain n’était pas chose aisée. Alors il arrivait parfois que des Purificateurs jouent de leurs pouvoirs pour faire peur aux Humains. Bref, les rues de Bristol n’inspiraient pas à la sécurité. Parfois, Joren se demandait comment ses parents vivaient la chose dans leurs beaux quartiers du haut Clifton.
Un sourire presque invisible se forma sur les lèvres de Joren. Il était content de voir son ami en vie et en un seul morceau. Rien n’était moins sur que le Ribcage. Cet endroit n’inspirait pas confiance.
Aidan lui avoua sans difficulté que le Rituel s’était déroulé dans des conditions difficiles. Que la transformation en humain avait été horrible et éprouvante. Pas étonnant … c’était comme rendre la vie à un corps mort en quelque sorte. Joren avait du mal à concevoir l’idée. Mais il était vrai que le teint de peau d’Aidan était beaucoup moins pâle qu’avant. Et sentir sa chaleur corporelle lui faisait du bien. Joren passa une main embarrassée dans ses cheveux, puis jeta un coup d’œil furtif à la pièce. Il n’aimait pas être entendu par le gardien et encore moins lors de retrouvailles. C’était une conversation intime et privée qui n’avait nullement besoin d’être surveillée. Il avait tellement de questions à lui poser et se voir restreindre à des banalités était d’une frustration sans équivoques.
Il bomba légèrement le torse, puis porta son regard sur le visage d’Aidan, le gratifiant d’un sourire qui se voulait réconfortant.
« Tu manques à la coloc’ bro. Depuis le départ de Ljena, j’ai l’impression que la baraque est complètement vide. J’ai du mal à m’y faire. Et au boulot, même si j’aime bien Bertrand, il n’est pas aussi efficace que toi en cuisine. »
Considérant doucement son ami, Joren se détendit un peu plus sur sa chaise. Le regard du gardien ne le gênait plus. Il essayait d’en faire une totale abstraction. De toute façon, entre la caméra, la bée vitrée et le gardien, il n’avait pas le choix d’accepter l’idée d’être épié du regard.
« J’imagine que ça n’a pas dû être une partie de plaisir ce qu’ils t’ont fait. Mais tu es humain maintenant. Tu auras probablement moins de problèmes … tu es juste plus vulnérable. Parfois je me demande comment j’ai réussi à survivre jusqu’à aujourd’hui ! C’est un exploit ! On est des héros du quotidien haha ! »
Il attrapa quelque chose dans son sac et sorti un sac en carton sur lequel était imprimé le logo du bar. Aidan pouvait le reconnaître d’un seul coup d’œil. Il s’agissait des délicieux sandwichs auxquels il n’avait jamais pu connaître le véritable goût. Des sandwichs qu’il n’avait pas arrêté de faire depuis presque 1 an, sans en manger la moindre miette.
« Tiens je t’ai ramené ça. Ils m’ont autorisé à le ramener jusqu’ici. Histoire que tes papilles gustatives reprennent un peu plus d’entrain que la purée fade qu’ils te servent ici. Tu sais quand tu sors exactement ? Alec est déjà venu te voir ? »
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Sujet: Re: visite au Ribcage (pv Aidan) Sam 15 Juin - 2:19
Aidan était vraiment heureux de revoir Joren. Il réalisait vraiment la chance qu’il avait. Joren, c’était cet ami qui avait toujours été là, qui ne l’avait jamais lâché, qui l’avait aidé au péril de sa vie, qui lui avait pardonné d’avoir disparu après sa transformation. Et même après l’avoir vu mordre un humain, il était resté à ses côtés. Il lui avait offert un toit, un emploi, histoire qu’il ne reste pas sans rien faire… Ce mec était une perle, un type en or. Et maintenant, il était à nouveau là. Il était venu dans ce lieu sordide parce qu’Aidan avait besoin de lui, il avait besoin de le voir, il avait besoin de son soutien. Alors forcément, après tout ça, le jeune homme se sentait ému et ne pouvait contenir ses larmes. De toute façon, il en avait déjà tellement versé depuis qu’il était là qu’il n’était plus à ça près. Aidan se confia à Joren, sans pour autant trop en dire. Il ne voulait pas prendre de risques inutiles et finir par rester plus longtemps ici que nécessaire. Les paroles de son ami lui firent un petit pincement au cœur car forcément, il repensa à cette coloc’, mais aussi au bar. « Tu dis juste ça pour me faire plaisir ! C’est pas compliqué de faire des sandwiches ! » Il n’avait pas vraiment réfléchi à ce qu’il ferait une fois dehors, mais il y avait pourtant des chances pour qu’il reprenne là où il s’était arrêté avant que sa vie ne soit chamboulée. Il avait envie de reprendre ses études, de passer son diplôme et de suivre la voie qu’il avait toujours voulue suivre : celle du journalisme. Il en aurait des choses à dire, maintenant. Néanmoins, il ne savait pas si ce serait une bonne idée. Il serait surveillé en permanence, il en avait conscience.
Joren avait raison, bien sûr. Aidan allait certainement avoir moins de problèmes, mais sa vie n’allait certainement pas être plus facile pour autant. « Ça reste à voir…je serai surveillé. Je devrai faire tout un tas de trucs pour…payer ma dette… » Il baissa la tête en même temps que la voix. Il se sentait presque honteux. Il avait l’impression d’être un criminel. Au fond, c’était peut-être ce qu’il était… après tout, il avait tué quelqu’un. Alors, il s’en sortait plutôt bien, finalement. Même si ça ne lui plaisait pas du tout. « Mais c’est vrai que je me demande aussi comment tu as fait pour survivre jusqu’ici ! T’es un superhéros, en fait ! » Il esquissa un petit sourire, vraiment content de pouvoir parler à son ami, même un peu. Et puis, Joren sortit quelque chose de son sac. Aidan constata avec surprise qu’il s’agissait d’un sandwich du bar. Il écarquilla les yeux avant de sourire de toutes ses dents. « Bon sang, Joren ! T’es le meilleur ! » Il était vrai que la nourriture ici laissait à désirer et puis, Aidan s’était toujours demandé quel goût avaient les sandwiches du bar. Il attrapa donc le sandwich et le déballa avant de croquer dedans à pleines dents. Il se mit à mâcher, les yeux fermés, ayant momentanément oublié tout ce qui l’entourait. Il était en proie à une vraie explosion gustative, là ! Au bout d’il ne savait combien de temps, il finit par rouvrir les yeux pour se rendre compte qu’il avait déjà dévoré la moitié du sandwich. Il ne put s’empêcher de rougir légèrement. « Oups.. Pardon ! Je crois que je me suis emporté ! » Il lâcha un petit rire. « Sérieux… qu’est-ce que je ferais sans toi ? C’est trop bon, en plus ! » Il redécouvrait les goûts des aliments et c’était sans doute l’une des parties les plus agréables de tout ça. Pouvoir à nouveau manger normalement et pouvoir se tenir au soleil sans risquer de se changer en torche humaine.
« Et…oui. Bien sûr qu’Alec est venu me voir. C’est moi qui lui ai demandé de te prévenir. Sans lui… tu ne serais peut-être toujours pas au courant. » Il poussa un petit soupir, sa bonne humeur du moment s’étant déjà envolée. « J’ai hâte de sortir d’ici. J’en peux plus… » Il soupira une nouvelle fois, puis releva les yeux sur son meilleur ami. « Tu sais… j’ai fait une grosse connerie. » Il se tut quelques instants. Admettre qu’on avait tué quelqu’un n’était pas facile, même s’il l’avait déjà dit à Alec et à Alina. « Je… Pendant l’attaque, je… j’ai tué quelqu’un. Je ne voulais pas… mais je… » Incapable de continuer, il se prit la tête entre les mains. Peut-être que Joren allait finalement lui tourner le dos après cet aveu. Il ne lui en voudrait même pas.
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Sujet: Re: visite au Ribcage (pv Aidan) Mar 18 Juin - 17:29
Aidan était vachement amoché. Du moins, Joren peinait à le reconnaître. Il n’avait probablement subit aucune violence de la part des autorités, mais le fait est que son état d’Humain ne lui allait pas très bien. Comme si le masque du vampire était finalement tombé pour laisser les stigmates du temps passé, s’afficher sur les traits de son visage. Il paraissait épuisé, plus fatigué et plus vieux. Les traits tirés, Joren lui donnait deux ou trois ans de plus dans la tronche. Il avait croqué à pleines dents le sandwich rapporté, jubilant clairement toutes les saveurs et goûts qui explosaient en bouche. Aidan n’avait pas arrêté de dire que les aliments n’avaient qu’un goût de cendre et de terre. Seul le sang avait une onctuosité particulière que Joren n’avait jamais comprise. Mais Aidan n’était plus un vampire désormais et il était important pour Joren que son ami reprenne goût aux bonnes choses de la vie qui lui ont été volé.
Un sourire entailla le visage de Joren face au plaisir que prenait Aidan. C’était beau de le voir ainsi, même si l’environnement ne s’y prêtait pas du tout. Ils auraient été tellement mieux sur la terrasse de leur petit jardin, profitant des rayons du soleil, d’une bière bien fraiche et de ce sandwich particulièrement convoité par tous les Bristoliens. Allez quoi, ce n’était pas mythe au final. Ils étaient vraiment bons ces sandwichs du Black Cat.
Après avoir déglutit une dernière bouchée, Aidan se concentra sur la situation. Il délaissa la nourriture de côté et son visage s’assombrit aussitôt. S’en était presque inquiétant. Joren voyait que son ami essayait de dire quelque chose. Quelque chose de difficile à avouer, une chose qui lui entravait la gorge. Et enfin il avoua. Il avoua sa plus grande crainte, son plus gros échec. Aidan avait tué quelqu’un.
Un silence de plomb tomba dans la pièce. Le cœur de Joren manqua de battre un instant. Il resta coït, les bras et les mains jointes posés sur la table. Son regard était figé vers Aidan. Le temps semblait s’être arrêté l’espace d’un instant et le sol s’était dérobé sous leurs pieds pour ne laisser qu’un vide autour d’eux. Un vide froid, insipide, brutal et déstabilisant. Soudain, la machine s’ébranla pour se remettre en marche. Le cerveau de Joren reprenait du jus et tout un tas de questions s’entrechoquèrent provoquant un courant électrique désagréable. La pièce se redessina lentement dans ce vide obscur. Les murs, le sol, puis les caméras, la table, les deux chaises et enfin le gardien. Joren déglutit péniblement.
Qu’avait fait Aidan ? Il n’était pas un tueur. Non. Il n’avait pas bien compris. Ou peut-être que Joren s’était tellement mis en tête qu’Aidan était un gentil vampire, qu’il ne tuerait jamais. Qu’il avait appris à se contrôler. Mais non. Un vampire, reste un vampire. Les pulsions sont trop fortes, trop puissantes pour y résister. Quand la colère fuse dans les veines, la force est dévastatrice et percute de plein fouet sans laisser la moindre chance à la raison. C’est la bête qui se réveille et qui dirige les rênes. Joren secoua la tête de droite à gauche, puis s’enfonça dans la chaise métallique inconfortable.
« Attends, attends … tu as quoi ? »
Voyant qu’Aidan essayait de s’expliquer, Joren l’interrompit en tendant son bras en avant. Comme pour stopper les mots d’excuse de la bouche de son meilleur ami.
« Laisse moi un instant Aidan … tu m’avais promis. Tu m’avais même juré de ne jamais laisser tes pulsions prendre le dessus. Bordel … tu as fini par tuer. T’as tué quelqu’un en laissant s’exprimer ta part d’ombre. »
Heureusement, Aidan n’était plus un vampire. Mais Joren était déçu. Déçu qu’il ait fini par céder et que toute l’idée qu’il s’était faite des Nocturnes tombe à l’eau. Il aurait voulu prendre Aidan pour exemple. Prouver aux gens que les Aberrations ne sont pas toutes bonnes à jeter. Qu’il existait une preuve exemplaire, de personnes bonnes et qui arrivaient à contrer le mal. Mais non. Toute cette idée s’écroulait brutalement.
Néanmoins, Joren finit par prendre les mains d’Aidan. Il ne pouvait pas le rejeter. Pas maintenant. Il était probablement la personne la plus importante à ses yeux, le seul véritable ami, la seule famille qu’il ait vraiment. Le regard de Joren était dur, mais pas réprobateur, ni accusateur.
« Tu m’as dit que c’était pendant une attaque ? Qu’est-ce qui s’est passé ? Tu as tué quoi, un humain ? C’était de la légitime défense ? Ta vie était-elle en jeu ? Y’a eu des témoins ? Bon sang … »
Il enleva ses mains de celles d’Aidan avec une pointe d’amertume. Joren se sentait stupide et inutile. Il n’avait pas été là pour son meilleur ami dans un moment où il en avait eu le plus besoin. Il avait même l’impression d’avoir loupé un penchant de sa vie.
« Je suis tellement désolé Aidan … désolé de ne pas avoir été là. J’ai l’impression d’avoir merdé. D’avoir été un gros con d’égoïste … putain. »
Invité
Sujet: Re: visite au Ribcage (pv Aidan) Mar 16 Juil - 4:12
Aidan revivait ce moment encore et encore. Le moment où tout avait basculé, le moment où il avait pris une vie, alors qu’il avait toujours tout fait pour que ça n’arrive pas. Il avait fallu d’une seule fois, d’une situation, d’une balle, d’une blessure pour qu’il perde pieds. Il avait commis l’irréparable et il était sans doute chanceux de ne pas avoir été simplement exécuté. Dès qu’il essayait de dormir, il revivait ce moment. D’où son air épuisé. En partie. Car il était évident que redevenir humain avait été épuisant, que ça lui avait coûté des forces, de l’énergie. Il accusait le coup, mais il savait aussi qu’avec le temps, il s’en remettrait, il reprendrait du poil de la bête. Il le fallait. Et puis, il n’était pas seul. Il y avait Joren, juste là, avec lui. Il y avait aussi Alina et Alec. Il devait rester optimiste, essayer de voir le côté positif de tout ça. Et à l’heure actuelle, le seul côté positif auquel il pensait était la bouffe. C’était probablement ce qu’il lui avait manqué le plus. Du coup, il préférait se concentrer là-dessus et sur ce délicieux sandwich que son meilleur ami avait ramené. Néanmoins, ce petit instant de plaisir ne dura pas. Car Aidan venait de se confier à Joren. Il lui avait avoué avoir tué un humain. Il ne savait pas vraiment à quoi s’attendre, il ignorait comment réagirait le jeune homme et il avait peur. Il avait peur de le perdre à cause de ça. Il avait déjà failli le perdre cette fois-là, derrière le bar, lorsque Joren l’avait surpris en train de mordre un humain. Serait-ce la fois de trop ? La réaction, ou l’absence de réaction du jeune homme l’inquiéta. Elle l’inquiéta beaucoup. Joren était clairement choqué vu la façon dont il le regardait. Vu son incapacité à prononcer le moindre mot. Les secondes semblaient durer des heures et Aidan sentit sa gorge se serrer et une boule se former au creux de son estomac. Ses yeux devinrent humides et il fit de son mieux pour retenir ses larmes. Maudites larmes. Il devait en avoir versé des litres depuis qu’il était ici.
Lorsqu’Aidan tenta d’expliquer son geste – même si, au fond, c’était impardonnable – Joren l’interrompit. Et les paroles qui suivirent lui firent mal. Très mal. A cet instant, il était persuadé d’avoir perdu son meilleur ami pour de bon. Il l’avait déçu. A présent, il devait lui faire horreur. Aidan se mordit la lèvre inférieure, tentant de contenir ces maudites larmes qui menaçaient toujours de couler le long de ses joues. Pas lui. Pas Joren. Il se mit à secouer la tête et ouvrit la bouche pour dire quelque chose, mais aucun son n’en sortit. Il était en proie à un profond désespoir. Il ne pouvait et ne voulait pas le perdre. « Je… » Sa voix se brisa. Il fut vraiment incapable de dire quoique ce soit. Néanmoins, ce fut finalement Joren qui rompit le silence qui venait de s’installer. Il lui prit les mains, geste qui surprit grandement Aidan qui lui lança un regard surpris, puis interrogateur. Joren tentait de comprendre ce qui s’était passé. Il ne l’avait donc pas encore totalement rejeté. Aidan devait-il se sentir soulagé ou était-il trop tôt ? Vu ses questions… mieux valait attendre un peu. Et puis, son cœur se serra à nouveau. Joren essayait de lui trouver des excuses, pensant qu’il avait sans doute agi en légitime défense, alors que ça n’avait pas été le cas. Le jeune homme secoua doucement la tête, mais ne répondit pas tout de suite. Il cherchait les bons mots. Mais existait-il seulement des bons mots pour décrire ce qu’il avait fait ? Son meilleur ami reprit la parole pour s’excuser. Quoi ?! Aidan écarquilla les yeux. Il n’en croyait pas ses oreilles. Il était sérieux, là ? « Arrête ! » Là, il sentait soudain de la colère l’envahir. Décidément, il passait réellement par toutes les émotions, aujourd’hui.
« Tout ce qui est arrivé… ce n’est pas ta faute ! Si tu avais été là, tu serais peut-être mort à l’heure qu’il est. Alors arrête ! Tu n’as pas à t’excuser. Tu n’as rien à te reprocher. Rien ! Tu entends ? » Bon sang. Mais c’était quoi, ce mec ? Comment pouvait-il dire ça ? Penser que s’il avait été là, les choses auraient été différentes ? Différentes dans le sens où Joren aurait été tué. « Mais…merci. Merci d’être là, en ce moment. Merci d’être venu. Merci d’être mon meilleur ami malgré tout. Merci de ne pas être parti, de ne pas m’avoir rejeté. » Il lui adressa un petit sourire, alors qu’il avait à nouveau les larmes aux yeux. « Je n’aurais pas supporté qu’il t’arrive quelque chose, alors enlève ces pensées de ta tête, d’accord ? » Il se leva et s’approcha de Joren pour le serrer dans ses bras. Il avait eu si peur. Mais encore une fois, son ami prouvait à quel point il était exceptionnel. « J’ai de la chance de t’avoir. » Il relâcha son étreinte et reprit place. Car il devait toujours dire la vérité sur ce qui s’était passé. « Mais peut-être que tu vas changer d’avis après avoir entendu ce que j’ai à dire. » Il poussa un soupir, prit une profonde inspiration, puis se lança. « Tout s’est passé très vite. J’étais là, tout près, quand l’attaque a eu lieu. Je ne voulais pas m’en mêler. Mais quand j’ai vu ces gardes tirer sur tout le monde, je n’ai pas pu rester là sans rien faire. J’ai voulu aider…j’ai voulu aider un loup-garou à terre et je…je me suis pris une balle. Je suis entré dans une rage folle…une rage jamais ressentie jusqu’à présent. La blessure me rendait fou, j’étais incapable de réfléchir, je ne me contrôlais plus. Il y avait un humain non loin de moi, un humain à don, je crois. Et je…Il n’avait rien demandé ! Rien ! Et je lui ai sauté dessus comme un animal pour le vider de son sang. » Evidemment qu’il y avait des témoins. Et puis, ils savaient ici. Il était persuadé qu’ils écoutaient leur conversation à cet instant précis. De toute façon, il avait déjà tout avoué. « Je suis désolé. Je t’ai déçu. Mais crois-moi…ce n’est sans doute rien comparé à ce que je ressens envers moi-même. » Il se détestait. Il ressentait une réelle aversion envers lui-même. Ce n’était pas parce qu’il était redevenu humain que ça minimisait les faits ou que ça les effaçait.